El Clan – la critique du film – aVoir

Derrière la façade d’une famille ordinaire se cache l’histoire d’un horrible fait divers, portée par un père de famille magnétique et glaçant.

L’argument : Dans l’Argentine des années 80, un clan machiavélique auteur de kidnappings et de meurtres vit sous l’apparence d’une famille ordinaire dans un quartier tranquille de Buenos Aires. Le clan est mené d’une main de fer par Arquimedes, le patriarche. Il contraint Alejandro, son fils aîné, une star du rugby évoluant dans la mythique équipe nationale, Los Pumas, ainsi protégé de tous soupçons par sa popularité, à lui fournir des candidats au kidnapping.

Notre avis : Plus grand succès du cinéma argentin avec 2,5 millions de spectateurs dans son pays, ce thriller historique a été couronné du prix du meilleur réalisateur pour Pablo Trapero (Carancho, Elefante Blanco) à la Mostra de Venise. Produit entre autres par les frères Almodovar, Pedro et Augustin, El Clan s’inspire d’un fait divers sordide qui eu lieu dans les années 80 à Buenos Aires, également traité avec la série TV Historia de un clan diffusée en 2015.



Pour bien comprendre l’enjeu même du film il est primordial de resituer le contexte historique. La trame suit la famille Puccio et se déroule au moment du basculement de la dictature militaire (1976-1983) au retour à la démocratie. A la tête de cette famille ordinaire issue d’un milieu modeste, le patriarche du nom d’Arquimedes semble être un vieil homme affable, travaillant pour l’Etat. Ce que le film énonce moins clairement, c’est qu’il fut plus exactement membre du SIDE (agence de renseignement d’Argentine) qui durant la dictature organisa des enlèvements et actes pour le moins obscurs. La démocratie entraîne donc la mise à l’écart de cet homme par un gouvernement qui tente de cacher ses anciennes affaires.

A première vue totalement insoupçonnable, ce vieil homme désormais en roue libre entraîne sa famille dans une spirale de violence, par une série d’enlèvements et de séquestrations de personnes fortunées en l’échange de rançons. La bipolarité de ce père aimant et tout en retenue ne s’en révèle que plus glaçante. L’acteur Guillermo Francella, véritable célébrité en Argentine et connu pour son jeu comique, interprète brillamment à contre-emploi ce personnage méthodique, inexpressif et commettant des actes de sang-froid. Le plus déboussolant pour le spectateur est de définir les motifs de cet homme qui « semble » équilibré et sans réel besoin financier.



Le fil rouge d’El Clan s’axe sur la relation entre Arquimedes et l’un de ses fils, Alejandro, rugbyman pour l’équipe national d’Argentine. Le deuxième est sous l’emprise du père, qui le manipule afin de l’utiliser comme appât pour les enlèvements. Passé le point de non retour, on n’ose imaginer le pire et l’aboutissement de cet engrenage. Tel un parfum prémonitoire, la chanson « All i’v got is a sunny afternoon » interprétée par le groupe british The Kinks, résonne dans nos têtes comme un soupçon d’ironie et induit un effondrement du château de carte familial.

Le climat qui se dégage des scènes dans la maison familiales et la juxtaposition avec les séquestrations dans le sous-sol renvoient à la violence psychologique présente dans des œuvres comme Canine (influence négative et malsaine des parents) ou le film de Gregory Wilson The Girl Next Door (également sur un fait divers d’enlèvement). Toutefois, on regrette que les autres membres de la famille ne soient pas davantage étoffés. Connaître leur ressenti aurait permit de mieux saisir leur tiraillement vis-à-vis des actes commis leur père.

Le réalisateur démontre une réelle maîtrise du plan-séquence avec deux scènes-clés. Tel un complice, le spectateur devient ainsi un membre de cette famille et un témoin forcé de leur mode opératoire. En dehors de la mise en scène, on note un réel travail de fond et d’enquête pour coller au plus près des événements même si encore aujourd’hui on ne connait pas toute la vérité autour de cette affaire. Le film prend donc une forme quasi-documentaire mélangeant images d’archives télévisées avec la reconstitution des enlèvements sous la forme de chapitres. Cependant, ce choix de structure donne un aspect quelque peu répétitif dans enchaînement des scènes.

Avec El Clan, Pablo Trapero nous montre comment un décor familier peut se révéler n’être que la couverture d’une horrible vérité. Même si certains passages semblent redondants, ce thriller historique est porté par une mise en scène maîtrisée et un acteur principal magnétique et glaçant.


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