Après Malaga, le Centre Pompidou compte s’exporter sur d’autres …

L’antenne provisoire du musée a été inaugurée samedi en grande pompe. D’autres projets sont à l’étude en Chine, en Argentine et aux Etats-Unis.

C’est en grande pompe qu’a été inauguré samedi le Centre Pompidou Malaga, en la présence du Premier ministre espagnol Mariano Rajoy, de la ministre française de la Culture Fleur Pellerin, et même du célèbre acteur Antonio Banderas. Pour l’occasion, Alain Seban, président du Centre Pompidou et initiateur du projet, a même prononcé son discours dans la langue de Cervantès. « Je crois très prometteur ce concept de Centre Pompidou provisoire, présentant pour quelques années, dans des lieux existants en France et à l’étranger, quelques dizaines d’œuvres issues des collections modernes et contemporaines du musée », a-t-il souligné. Il y croit tellement que d’autres délocalisations pourraient être annoncées dans les mois qui viennent : en Chine, en Argentine, et peut-être même au pays de l’Oncle Sam, avec des discussions en cours avec une université de Chicago. A charge pour son successeur, Serge Lasvignes , aux manettes à partir du 2 avril, de conclure.

250.000 visiteurs attendus chaque année

Pour l’institution française, ce genre d’opération permet de faire « tourner » et donc de donner de la visibilité, à une collection gigantesque (la seconde au monde après le Moma de New York) de 100.000 œuvres dont beaucoup dorment dans les réserves. Et du même coup, de médiatiser sa marque et de vendre son expertise. Le musée sera ainsi rémunéré 1 million d’euros net de tous frais, chaque année. Intéressant en période d’argent public rare. Et deux ou trois Centres Pompidou provisoires délocalisés à l’étranger, cela génère les recettes nécessaires pour en ouvrir un dans une ville de l’Hexagone, sans redevance cette fois : Libourne et Cambrai, qui avaient déjà fait l’expérience d’une autre décentralisation culturelle, le Centre Pompidou « mobile » sous chapiteau, se sont déclarées intéressées. Fleur Pellerin, lors de l’inauguration à Malaga, a vivement encouragé ce type d’initiative qui selon elle, participe du rayonnement de nos institutions et de notre expertise muséale, n’hésitant pas à citer Picasso, l’enfant du pays : « Tout ce qui peut être imaginé, est réel ». « Cela complète notre politique d’expositions hors les murs qui a drainé 667.000 visiteurs en 2013 et rapporté 3,5 millions d’euros », précise Alain Seban.

Le Cubo, cette nouvelle vitrine du Centre Pompidou, dans une région de l’Espagne accueillant 10 millions de visiteurs par an, a demandé plusieurs années de préparation et un investissement de 7 millions d’euros de la Ville de Malaga pour aménager et mettre en valeur 7.000 mètres carrés. En bord de mer, le musée a son totem, comme le Louvre sa pyramide : une œuvre signée Daniel Buren. Le budget d’exploitation du lieu est lui évalué à 4 millions par an. Pour le boucler, outre la billetterie (pas moins de 250.000 visiteurs sont attendus chaque année, attirés par une exposition permanente et trois accrochages temporaires) du mécénat est d’ores et déjà engrangé : les entreprises ont apporté 700.000 euros quand le musée n’en espérait que 150.000.

La culture comme levier de développement

Le Centre Pompidou Malaga s’inscrit dans une politique ambitieuse du maire, qui a fait de la culture un levier de développement : la cité balnéaire offre pas moins d’une trentaine de musées (lire ci-dessous) dont un consacré à Picasso. « Le Centre Pompidou est un vecteur de créativité, d’éducation, un engrais culturel qui va fertiliser Malaga. Et justement nous souhaitons être une ville de l’innovation, attirant des entreprises digitales notamment », observe Francisco de la Torre Prados, le premier magistrat. Malaga, qui accueille aussi une antenne d’un musée de Saint-Pétersbourg, va se doter d’un espace dédié aux Beaux-Arts d’ici à la fin de l’année.

A noter :

Le Centre Pompidou mobile, autre concept aujourd’hui abandonné, avait attiré, lui, entre octobre 2011 et septembre 2013, près de 250.000 visiteurs.

Malaga a moins de 600.000 habitants mais compte 36 musées, dont certains très renommés, comme le Picasso ou le Thyssen. La ville a par exemple, un musée du vin, un musée taurin, un centre d’art contemporain, ou encore un musée de l’automobile. Par ailleurs, trois jours avant l’inauguration du Pompidou, s’est tenue celle de la filiale du musée public d’Art russe de Saint-Petersbourg. Ce développement artistique, la ville le doit au volontarisme de son maire, Francisco de la Torre (parti Populaire, droite, le parti de Rajoy) qui cherche à faire de Malaga, capitale de la Costa del Sol et donc du tourisme de plage, un pôle touristique culturel et urbain malgré l’absence de monuments historiques du calibre de ceux des autres capitales andalouses : Séville, Cordoue et Grenade. La légende, relayée par la presse, veut que De La Torre ait évoqué l’installation d’un grand musée français à Malaga lors d’un match de foot en 2008 au cours d’une conversation avec l’ambassadeur de France d’alors, Bruno Delaye.

GAËLLE LUCAS

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