Zika : la menace est mondiale

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Zika : la menace est mondiale
Arnulfo Franco/AP/SIPA






Alors qu’une dizaine de pays d’Amérique latine et des Caraïbes luttent contre l’essor de l’épidémie de Zika, la menace plane désormais sur l’Occident. Une équipe internationale de chercheurs a en effet montré, dans un article paru le 14 janvier dans The Lancet, que le virus Zika a le potentiel de se propager dans le nord du continent américain ainsi qu’en Europe.

A 8 mois des Jeux Olympiques de Rio, les scientifiques prennent le danger très au sérieux. « Le monde dans lequel nous vivons est interconnecté. Les infections ne sont plus confinées dans une région isolée, avertit l’un des auteurs, le Dr Isaac Bogoch, spécialiste des maladies infectieuses au Toronto General Hospital. Aujourd’hui, les maladies originaires des coins les plus reculés du monde arrivent à une vitesse fulgurante à notre porte ».

Des épidémies récentes

Découvert pour la première fois en 1947 chez un singe en Ouganda, le virus Zika est ensuite isolé chez un moustique Aedes. Il provoquera sa première épidémie en Micronésie en 2007. « A l’époque, c’était la plus importante jamais rapportée au monde. Elle était décrite comme une maladie bénigne entraînant de la fièvre, des douleurs articulaires, une conjonctivite et des éruptions cutanées, explique à Pourquoidocteur Arnaud Fontanet, directeur de l’unité d’épidémiologie des maladies émergentes à l’Institut Pasteur (1). Des manifestations cliniques que l’on retrouve dans d’autres maladies du même type comme la dengue véhiculée, elle aussi, par le moustique Aedes aegypti. »

Puis en 2013, le virus Zika frappe la Polynésie française. Pour la première fois, les médecins constatent une complication neurologique post-infectieuse, le syndrome de Guillain-Barré. Une complication également observée au Brésil, victime d’une épidémie de fièvre Zika sans précédent - entre 440 000 à 1 300 000 cas suspects ont été rapportés - depuis mai 2015.

Mais dans ce pays d’Amérique latine, c’est un autre syndrome qui inquiète. En 9 mois, plus de 3 000 enfants infectés lors de la grossesse souffrent de microcéphalie. Depuis l’arrivée de Zika au Brésil, l’incidence de cette malformation congénitale a été multipliée par 20.

 

Arnaud Fontanet, directeur de l’unité d’épidémiologie des maladies émergentes à l’Institut Pasteur : « Ce seraient des femmes qui sont infectées par le virus Zika alors qu'elles sont enceintes mais on ne sait pas quelle est la période de la grossesse qui est la plus à risques. »

 

Une cartographie des zones à risque

Aujourd’hui, cette complication probablement liée à Zika affole le monde entier. Une inquiétude d’autant plus grande que des cas sont constatés dans les pays exempts du virus, notamment aux Etats-Unis. Ces cas sont le résultat d’une importation du virus par des voyageurs infectés. Il est, par ailleurs, très probable que ces personnes ignorent être porteuses du virus car seulement 20 % des infections sont symptomatiques.

Aussi pour prédire les risques de propagation, les chercheurs ont analysé les connexions aériennes entre le Brésil et les différents pays du monde. Parmi les 10 millions de voyageurs, 65 % se dirigent vers les Etats-Unis (plus de 2,7 millions), 27 % vont en Europe (1,2 millions de personnes atterrissent en Italie, Portugal et France) et 5 % en Asie.

« Le risque de développer une épidémie localement dépend ensuite de la présence du vecteur et les conditions dans lesquelles il vit », précise le Dr Fontanet. Comme ses cousins la dengue et le chikungunya, le virus Zika apprécie les régions tropicales et subtropicales, avec une prédilection pour les zones urbaines.

Un risque« réel » en métropole

Les chercheurs de l’Université d’Oxford se sont donc intéressés aux pays réunissant des différents éléments. Selon la répartition des moustiques capables de transmettre Zika, Aedes aegypti et l’Aedes albopictus (plus connue sou le nom de moustique tigre), ils estiment que plus de 60 % de la population des Etats-Unis, d’Argentine et d’Italie vivent dans des zones favorables à sa transmission.

En juillet dernier, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) a estimé que « les conditions pour une transmission autochtone du virus Zika sont réunies dans les départements français d’Amérique ». Les 47 cas confirmés début janvier 2016 en Martinique le prouvent.
Et avec plus de 2,5 millions de passagers aériens entre la France et ces départements d’Outre mer auxquels s’ajoute la présence du moustique tigre dans 30 départements français, le risque de transmission en métropole est « réel ».

 

Arnaud Fontanet : « Dans le sud de la France, le moustique Aedes albopictus est présent. En ce moment nous sommes en période hivernale, il n'est pas aux mieux pour une transmission mais elle pourrait avoir lieu lorsque la saison sera favorable. »

A l’heure actuelle, il n’existe ni vaccin ni antiviral pour lutter contre la propagation de ce virus. La contre-attaque passe alors par la chasse aux moustiques. Vider régulièrement voire éliminer les coupelles sous les pots de fleurs et les vases en extérieurs sont les méthodes les plus radicales. L’ajout de poisson dans les boissons est également une bonne solution car ils mangent les larves de moustiques. Il est également vivement recommandé, en particulier aux femmes enceintes, d’utiliser des répulsifs et de porter des vêtements longs.

(1) Professeur titulaire de la chaire ''Santé et Développement'' au Conservatoire national des arts et métiers.
















Arnulfo Franco/AP/SIPA

Alors qu’une dizaine de pays d’Amérique latine et des Caraïbes luttent contre l’essor de l’épidémie de Zika, la menace plane désormais sur l’Occident. Une équipe internationale de chercheurs a en effet montré, dans un article paru le 14 janvier dans The Lancet, que le virus Zika a le potentiel de se propager dans le nord du continent américain ainsi qu’en Europe.

A 8 mois des Jeux Olympiques de Rio, les scientifiques prennent le danger très au sérieux. « Le monde dans lequel nous vivons est interconnecté. Les infections ne sont plus confinées dans une région isolée, avertit l’un des auteurs, le Dr Isaac Bogoch, spécialiste des maladies infectieuses au Toronto General Hospital. Aujourd’hui, les maladies originaires des coins les plus reculés du monde arrivent à une vitesse fulgurante à notre porte ».

Des épidémies récentes

Découvert pour la première fois en 1947 chez un singe en Ouganda, le virus Zika est ensuite isolé chez un moustique Aedes. Il provoquera sa première épidémie en Micronésie en 2007. « A l’époque, c’était la plus importante jamais rapportée au monde. Elle était décrite comme une maladie bénigne entraînant de la fièvre, des douleurs articulaires, une conjonctivite et des éruptions cutanées, explique à Pourquoidocteur Arnaud Fontanet, directeur de l’unité d’épidémiologie des maladies émergentes à l’Institut Pasteur (1). Des manifestations cliniques que l’on retrouve dans d’autres maladies du même type comme la dengue véhiculée, elle aussi, par le moustique Aedes aegypti. »

Puis en 2013, le virus Zika frappe la Polynésie française. Pour la première fois, les médecins constatent une complication neurologique post-infectieuse, le syndrome de Guillain-Barré. Une complication également observée au Brésil, victime d’une épidémie de fièvre Zika sans précédent - entre 440 000 à 1 300 000 cas suspects ont été rapportés - depuis mai 2015.

Mais dans ce pays d’Amérique latine, c’est un autre syndrome qui inquiète. En 9 mois, plus de 3 000 enfants infectés lors de la grossesse souffrent de microcéphalie. Depuis l’arrivée de Zika au Brésil, l’incidence de cette malformation congénitale a été multipliée par 20.

 

Arnaud Fontanet, directeur de l’unité d’épidémiologie des maladies émergentes à l’Institut Pasteur : « Ce seraient des femmes qui sont infectées par le virus Zika alors qu'elles sont enceintes mais on ne sait pas quelle est la période de la grossesse qui est la plus à risques. »

 

Une cartographie des zones à risque

Aujourd’hui, cette complication probablement liée à Zika affole le monde entier. Une inquiétude d’autant plus grande que des cas sont constatés dans les pays exempts du virus, notamment aux Etats-Unis. Ces cas sont le résultat d’une importation du virus par des voyageurs infectés. Il est, par ailleurs, très probable que ces personnes ignorent être porteuses du virus car seulement 20 % des infections sont symptomatiques.

Aussi pour prédire les risques de propagation, les chercheurs ont analysé les connexions aériennes entre le Brésil et les différents pays du monde. Parmi les 10 millions de voyageurs, 65 % se dirigent vers les Etats-Unis (plus de 2,7 millions), 27 % vont en Europe (1,2 millions de personnes atterrissent en Italie, Portugal et France) et 5 % en Asie.

« Le risque de développer une épidémie localement dépend ensuite de la présence du vecteur et les conditions dans lesquelles il vit », précise le Dr Fontanet. Comme ses cousins la dengue et le chikungunya, le virus Zika apprécie les régions tropicales et subtropicales, avec une prédilection pour les zones urbaines.

Un risque« réel » en métropole

Les chercheurs de l’Université d’Oxford se sont donc intéressés aux pays réunissant des différents éléments. Selon la répartition des moustiques capables de transmettre Zika, Aedes aegypti et l’Aedes albopictus (plus connue sou le nom de moustique tigre), ils estiment que plus de 60 % de la population des Etats-Unis, d’Argentine et d’Italie vivent dans des zones favorables à sa transmission.

En juillet dernier, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) a estimé que « les conditions pour une transmission autochtone du virus Zika sont réunies dans les départements français d’Amérique ». Les 47 cas confirmés début janvier 2016 en Martinique le prouvent.
Et avec plus de 2,5 millions de passagers aériens entre la France et ces départements d’Outre mer auxquels s’ajoute la présence du moustique tigre dans 30 départements français, le risque de transmission en métropole est « réel ».

 

Arnaud Fontanet : « Dans le sud de la France, le moustique Aedes albopictus est présent. En ce moment nous sommes en période hivernale, il n'est pas aux mieux pour une transmission mais elle pourrait avoir lieu lorsque la saison sera favorable. »

A l’heure actuelle, il n’existe ni vaccin ni antiviral pour lutter contre la propagation de ce virus. La contre-attaque passe alors par la chasse aux moustiques. Vider régulièrement voire éliminer les coupelles sous les pots de fleurs et les vases en extérieurs sont les méthodes les plus radicales. L’ajout de poisson dans les boissons est également une bonne solution car ils mangent les larves de moustiques. Il est également vivement recommandé, en particulier aux femmes enceintes, d’utiliser des répulsifs et de porter des vêtements longs.

(1) Professeur titulaire de la chaire ''Santé et Développement'' au Conservatoire national des arts et métiers.












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Mis à jour le 18 janvier 2016
par Philippe Berrebi


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Sujet médical, santé, de société, de santé publique, cette rubrique revient sur le fait du jour en le mettant en perspective et en l'éclairant avec des experts. Un article de deux feuillets et demi assorti de deux interviews audio. Le sujet est nourri, bien sûr, par l'actualité mais aussi par des publications nationales ou internationales, par des communications présentées lors des principaux congrès de médecine. Le journaliste s'attache à mettre en perspective l'information traitée, soit en relativisant sa portée (nouveau médicament, nouveau vaccin), soit, au contraire, en dressant les perspectives de développement.






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