Un Uruguayen affirme avoir fui la dictature argentine grâce au pape …

En 1977, Gonzalo Mosca avait 28 ans et était membre du GAU (Groupe d'Action Unificatrice), un mouvement de gauche opposé à la dictature uruguayenne (1973-1985). Recherché par les autorités militaires, il était parvenu à fuir vers Buenos Aires, de l'autre côté du Rio de la Plata, mais il restait sous la menace des militaires argentins.

Son frère, un prêtre jésuite, a alors sollicité l'aide du père Bergoglio. "Il a dit à mon frère : 'Viens avec ton frère, et voyons comment nous pouvons l'aider'", a témoigné Gonzalo Mosca. La nuit même, Jorge Bergoglio a conduit les deux frères dans un couvent de San Miguel à quelque 30 km de Buenos Aires. "A cette époque, la répression en Argentine était très forte (...) je me demandais si le père (Bergoglio) était véritablement conscient de ce qui était en jeu", a expliqué Gonzalo Mosca.

Faux retraitant

Après avoir passé plusieurs jours "d'une tension extrême" dans l'établissement, où il se faisait passer pour un individu en retraite spirituelle, le jeune militant reçut un appel du chef des jésuites l'informant du plan à suivre : Gonzalo Mosca et son frère devaient voyager jusqu'à la ville touristique d'Iguazu, près des frontières brésilienne et paraguayenne, d'où ils devaient tenter de gagner le Brésil. "Il nous a conduit à l'aéroport et m'a accompagné pratiquement jusqu'à l'avion, pour me faire profiter de tout le soutien et des garanties liées à son statut", selon l'ex-fugitif.

Un plan qui fonctionna

Gonzalo Mosca réussit ainsi à gagner le Brésil, puis résida chez les jésuites à Rio de Janeiro avant de voyager vers l'Europe avec le statut de réfugié. S'il n'a jamais revu le prêtre, Gonzalo Mosca explique avoir tenu à témoigner lorsqu'il a eu vent des accusations visant le prélat sur son implication présumée dans l'enlèvement des deux missionnaires sous la dictature argentine (1973-1983).

Le Vatican a fermement rejeté les accusations de connivence présumée avec la junte militaire argentine à l'encontre du pape François, les qualifiant de "calomnieuses et diffamatoires". Le Prix Nobel de la Paix en 1980 Adolfo Perez Esquivel et un jésuite torturé par la junte ont également fait des déclarations destinées à laver le nouveau pape de ces soupçons.

Deux papes : un moment inédit dans l'histoire de l'Eglise catholique

Deux hommes en blanc, un pape régnant et un pape émérite, se rencontrent ce samedi dans la résidence pontificale d'été de Castel Gandolfo, au sud de Rome, un moment inédit dans l'histoire de l'Eglise catholique confrontée à de nombreux défis. Dix jours après son élection, le pape argentin se rendra en hélicoptère à la mi-journée dans ce village des Collines albines où Joseph Ratzinger s'est retiré dans le silence et la prière depuis sa démission le 28 février.

L'heure d'arrivée du pape en hélicoptère a été annoncée 12h15 mais non celle du départ, signe qu'ils veulent se donner du temps. Ils déjeuneront ensemble. Le Vatican a indiqué que le pape émérite, qui vit à Castel Gandolfo avec quatre laïques consacrées "Memores Domini" qui le servent, avait regardé à la télévision l'élection de son successeur et sa messe inaugurale.

Beaucoup à se dire, mais cela restera secret

En dépit de l'extrême curiosité que suscite cette rencontre historique, le Vatican a prévu une communication minimale. Ce que se diront le pape émérite de 85 ans et son cadet de neuf ans de moins restera secret. Mais les sujets ne manquent pas pour une Eglise de 1,2 milliard de fidèles : la "nouvelle évangélisation", les persécutions contre les chrétiens, la réforme de la Curie, les contestations, les scandales d'argent et de sexe, notamment le terrible scandale des abus sexuels sur des enfants. Selon la presse italienne, Benoît XVI aurait rédigé un memorandum de 300 pages à l'intention de son successeur.

Les deux pontifes devraient parler de "Vatileaks", l'affaire des fuites de documents confidentiels, sur laquelle des cardinaux à la retraite ont mené une enquête parallèle et rédigé un rapport qui n'a été transmis qu'au nouveau pape.

Avant de démissionner, Benoit XVI avait assuré son "obéissance inconditionnelle" au futur pape et dit qu'il se retirait du monde, n'ayant plus aucune vie publique. Depuis son élection, Jorge Bergoglio a téléphoné deux fois à son prédécesseur, la dernière fois mardi pour lui souhaiter bonne fête le jour de la Saint-Joseph qui était le jour de sa propre messe d'installation.

Les deux hommes se connaissent depuis longtemps : au conclave de 2005, Jorge Bergoglio, était le principal concurrent de Joseph Ratzinger, et représentait une orientation plus ouverte et sociale parmi les cardinaux. Mais il avait préféré se retirer de la course. Ils ont des tempéraments profondément différents : autant Joseph Ratzinger était réservé devant la foule, autant Jorge Bergoglio est spontané, va vers les gens, et cherche à limiter au maximum les honneurs qui entourent un pape.

Joseph Ratzinger, par respect de la tradition, par manque de spontanéité et sans doute parce qu'il n'aimait pas l'innovation et se méfie de tout ce qui est spectaculaire, n'a que très rarement improvisé. Toutefois, Jorge Bergoglio a repris à son compte l'héritage de son prédécesseur, dans sa condamnation de la "dictature du relativisme", vendredi devant les diplomates.

Changement de style, continuité dans la doctrine

Dans quasiment tous ses discours, Jorge Bergoglio s'est référé d'une manière ou d'autre à Benoît XVI, une manière de dire que s'il a adopté un changement radical dans le style, il y a une continuité dans la doctrine. Sur les questions de société par exemple, Joseph Ratzinger et Jorge Bergoglio partagent des positions conservatrices, qu'il s'agisse du mariage gay, de l'avortement et de l'euthanasie, des atteintes à la "création" pour l'Eglise catholique.

La popularité extrême qu'a acquise François est perçue avec une amertume par certains au Vatican, où l'on juge injuste l'oubli qui semble déjà frapper le pape allemand dans le grand public.

AFP et Belga

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