Je leur ai dit qu'il y avait un joueur incroyable, une sorte de Super Hros au milieu de terrain. Un mec hyper lgant. Comme je passais mon temps parler football, mes camarades fatigus de mentendre ont fini par semporter contre moi. Jai alors lch une phrase, une phrase dont je me suis rappel plusieurs annes aprs : Un jour, je ferai des une-deux avec Redondo ! Explosions de rires. Des rires la fois terribles et moqueurs : Toi tu vas faire des une-deux avec Redondo ? Bah voyons ! . Cest ce moment-l, au moment o la rcration prenait fin, que la bagarre a clat. Dun coup, tous les gamins ont lch leurs Alfajores Jorgito (des petits snacks argentins, ndlr) pour se jeter les uns sur les autres. Voil, ctait en 1985 et nous ntions que des lves de primaires.
Le football sest agenouill ses pieds
Stratge, intelligent et gaucher en plus de cela ! A cette poque, il ny avait pas de numro 5 gaucher en Argentine. En revanche, il y avait des esthtes ou plutt des porte-drapeaux du bon football comme Marangoni (Independiente) et Checho Batista (Argentinos Juniors). Nanmoins, quand Fernando Redondo est apparu, le football sest agenouill ses pieds, comme si, avant lui, aucun milieu de terrain n'avait montr autant dautorit et de consistance. Javais 9 ans quand la slection des moins de 16 emmene par Redondo, Cceres, Hugo Maradona, Frutos et Salaberry a remport le Sudamericano, la Copa America des catgories jeunes, Buenos Aires. Le match se dispute sous une pluie dencouragements inconditionnels. Ce jour-l, sur le terrain, il y eu aussi un dluge de football offensif. Splendide. Ces joueurs ntaient que des Pibes , raison pour laquelle je midentifiais beaucoup eux. En les regardant, jimaginais combien ce serait merveilleux de pouvoir jouer, mon tour, avec le maillot de la slection argentine. Redondo tait un cran au-dessus des autres. Il savait dj grer les diffrents rythmes dun match et mettait dj ses crochets si distinctifs, ceux qui changent le sens du jeu. Il tait capable dhabiller les quipes pour lesquelles il jouait de leur plus beau costume, sans jamais leur faire perdre leur agressivit.
La suite de son histoire ? La grande majorit la connat. Son dbut prcoce en premire division argentine sous le glorieux maillot Del Bicho (Argentinos Junior), son dpart polmique pour lEspagne o il a confirm son talent Tenerife avant de briller et de devenir, la fois, un modle et une idole au Real Madrid. Avec les Merengues, il a invent la journe de la talonnade Old Trafford et soulev deux Ligue des Champions et une Coupe Intercontinentale. Il a aussi mis son magntisme, son leadership et sa classe au service de lAlbiceleste, mme si cela semble incroyable quil nait disput quune Coupe du Monde, en 1994 ! Malgr cela, il fut lun des personnages principaux des diffrents pisodes de la telenovela de la Selecion avec laquelle il remporta la Copa America. Ses adieux furent son image : aristocratique et plein de classe. Il ne pouvait en tre autrement de toute faon. Aprs avoir souffert de blessures rptitions avec le Milan AC et glan une coupe dItalie, il obtient la reconnaissance de tous pour son thique de gentleman. Pour rappel, Redondo renona son salaire, arguant quil ne se sentait pas de gagner de largent alors quil tait bless. Un geste rare.
Comme des gamins
Redondo et moi nous sommes rencontrs en 1999, aprs le Mondial en France pour lequel Fernando navait pas t convoqu*. LArgentine devait disputer deux matchs amicaux contre le Brsil. En plus daffronter dnormes joueurs de la trempe de Cafu, Ronaldo, Ronaldinho ou Roberto Carlos, le classico sud-amricain proposait cette fois un autre ingrdient particulier : le duel entre Rivaldo et Redondo, les deux idoles respectives du FC Barcelone et du Real Madrid. Un derby plutt quilibr, au final. Nous avons battu le Brsil au Monumental... qui a pris ensuite sa revanche Porto Alegre. Il devait srement y avoir quelques-uns de mes amis denfance dans les tribunes du stade de River Plate ce jour-l. Quelques-uns dentre eux ont sans doute lch un sourire lorsquaprs un double une-deux entre Redondo et Sorin, lArgentine marquait son deuxime but, dclenchant le dlire dans les traves du stade. Quatorze ans taient passs depuis le jour o javais mentionn pour la premire fois le nom de Fernando Redondo. a ne nous a pas empchs pas de courir tous les deux pour fter le but. Comme des gamins. Comme si la rcration venait de commencer.
* Il avait refus de se couper les cheveux...
Par Juan-Pablo Sorin, 76 slections en quipe d'Argentine
Le blog de Juan Pablo Sorin sur SoFoot.com
Energa Positiva
Abrazo
PS:Je serai de retour au Parc des Princes, huit ans aprs lavoir quitt, pour assister au derby PSG-OM du 31 octobre. Ce sera un moment trs spcial!
Dici l jattends de lire vos commentaires, ci-dessous ou sur mon Twitter .
Allez...
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