Fébrile puis brillant, le XV de France a surclassé l'Argentine 39-22, samedi soir, au Grand Stade Lille, une semaine tout juste après une victoire déjà convaincante face à l'Australie (33-6). Le message de "continuité" et de "culture de la gagne" martelé par le capitaine Pascal Papé avant la rencontre est bien passé. Ses troupes ont sécurisé la quatrième place au classement IRB, si important pour le tirage au sort des poules de la Coupe du monde de 2015 en Angleterre. "Je suis content qu'on puisse enchaîner deux victoires d'affilée contre des nations de l'hémisphère Sud. Il n'y a pas de pays européen qui a gagné contre ces nations", a savouré le patron des Bleus Philippe Saint-André en conférence de presse.
Ce succès, le deuxième d'affilée face aux Argentins après celui de juin (10-49) et le troisième consécutif en France après 2008 (12-6) et 2010 (15-9), rééquilibre le bilan plutôt négatif face aux Pumas : désormais 5 victoires pour 8 défaites depuis 2002. Absents durant les premières minutes, les Bleus, orchestrés par l'excellent Frédéric Michalak (24 points) à l'ouverture, ont trouvé leur salut par un jeu d'attaque ambitieux, prompt à maximiser tous les ballons, que ce soit au large ou dans l'axe, sans oublier l'engagement et le combat. "On a osé, on a joué, on s'est fait des passes. Je me suis régalé lors de la première mi-temps avec de l'ambition, des contacts et des initiatives", a reconnu Saint-André. Les Français ont marqué par trois essais de Vincent Clerc (18e, 21e) et Yannick Nyanga (32e), trois transformations et cinq pénalités (4e, 61e, 69e, 73e, 78e) de Frédéric Michalak, également auteur d'un drop (47e). Les Argentins ont inscrit un essai par Marcelo Bosch (5e), une transformation et quatre pénalités par Nicolas Sanchez (10e, 14e, 45e, 56e), qui a aussi inscrit un drop (66e).
Entame ratée
Sous le toit fermé du Grand Stade, l'entame des Bleus, soldée par une pénalité de Michalak, n'a guère impressionné les Argentins qui ont marqué le premier essai de la rencontre, sur leur premier ballon, par le centre Bosch, transformé par Sanchez (5e). Imperméable aux déferlantes australiennes la semaine dernière, la défense française a montré des signes de faiblesse inquiétants, se mettant à la faute pour offrir deux pénalités faciles à Sanchez (10e et 14e). À 13-3, le mythe de l'inconstance des Français rabâché par le sélectionneur national Philippe Saint-André toute la semaine était tout trouvé pour expliquer ce premier quart d'heure hors sujet.
"On n'a pas attaqué le match de la meilleure façon. Mais sur le terrain je n'ai entendu que des encouragements. Personne ne voulait lâcher. Je retiens cet état d'esprit", a souligné Papé, marqué par le rude combat. Il a fallu trois minutes aux Français, "qui n'ont pas paniqué", selon Saint-André, pour briser ce mythe. Réveillés par la jeune garde, Maxime Machenaud au plaquage et Brice Dulin explosif sur terre et royal dans les airs, ils ont enchaîné dans l'axe avant d'envoyer la balle au large pour l'essai de Clerc, transformé par Michalak (18e).
Doublé de Clerc
La férocité des plaquages tricolores a donné un ballon de récupération bonifié par un coup de pied de Florian Fritz et une course victorieuse de 40 mètres de Clerc, essai transformé par Michalak (21e). Avec son 33e et 34e essai sous le maillot frappé du coq, Clerc dépasse Saint-André (32) au classement des meilleurs marqueurs d'essais français, pour se rapprocher du record de Serge Blanco (38). Une course rageuse de Nyanga en plein coeur de la défense argentine a ponctué un formidable quart d'heure français qui a asphyxié les Pumas (32e, 24-13) - "beaucoup de rythme, de jeu et de vitesse", dixit Saint-André.
Après cette première mi-temps jouée sur un rythme infernal, où les piliers se sont sentis inutiles avec une seule mêlée (38e), la seconde était meublée par les buteurs. Un drop et quatre pénalités de Michalak (7 sur 8 aux tirs au but) ont répondu à deux pénalités et à un drop de Sanchez. "En seconde mi-temps, on a quand même maîtrisé. Il faut féliciter l'état d'esprit des joueurs", a analysé Saint-André. Sérieux et attentifs, les Bleus n'ont plus baissé la garde en défense tout en continuant de produire des mouvements offensifs d'envergure. Inspirés dans leur jeu de passe, les feux follets tout de bleu vêtu ont ravi de plaisir le stade, qui leur a répondu par des vibrants "Allez, les Bleus !" mérités.