Philippe Saint-André tourne une page du XV de France

Huit joueurs sans la moindre sélection ont été retenus pour préparer les tests de novembre. Un an après la Coupe du monde, Philippe Saint-André estime qu'il fallait tourner une page. Et changer de génération.


france saintandre © Panoramic

Philippe Saint-André, vous avez décidé de rajeunir votre groupe pour cette tournée très importante. Comment abordez-vous ces trois matchs ?
C'est effectivement une tournée très importante avec trois matchs internationaux et le tirage au sort de la prochaine Coupe du monde le 3 décembre prochain. Nous sommes cinquièmes pour le moment au classement IRB et ce serait bien de gagner une place pour être tête de série. Pour ça, il faudra relever un gros challenge. C'est intéressant et excitant. On va affronter les Australiens qui sont en forme, les Argentins et les Samoa. On aura moins de temps qu'eux qui sont réunis depuis cinq mois. Nous, on n'aura que neuf jours avec un groupe de 33 joueurs. Nous avons voulu être fidèles à ce qu'on fait depuis le début avec un jeune joueur à gros potentiel par ligne. Ils vont toucher du doigt le très haut niveau. Certains n'ont pas disputé beaucoup de matchs de Top 14 mais ils démontrent des qualités exceptionnelles. Ils peuvent être présents maintenant ou lors de la prochaine Coupe du monde.

Est-ce possible de penser à la fois au présent et à la prochaine Coupe du monde ?
C'est le gros challenge. Nous sommes obligés. Après la Coupe du monde, c'était normal de continuer avec cette génération finaliste en Nouvelle-Zélande. Certains étaient à la limite d'âge et ne seront pas là à la prochaine Coupe du monde. En Argentine, nous sommes vraiment repartis avec un groupe jeune. C'est l'ossature de cet effectif, avec vingt joueurs sur trente-trois qui étaient en Argentine. Il y a aussi quelques revenants. Nicolas Mas va rejouer dès ce week-end avec Perpignan. On avait mis Vincent Clerc au repos. On sait que c'est un joueur d'expérience et un gros finisseur, mais aussi notre capitaine Thierry Dusautoir qui avait donné énormément. Aussi bien avec le Stade Toulousain qu'avec l'équipe de France. Il revient comme capitaine et Pascal Papé sera vice-capitaine au mois de novembre.

Est-ce la première vraie liste de votre mandat avec une page qui se tourne ?
Oui, on a fait cette liste avec le comité de sélection, Yannick (Bru) et Patrice (Lagisquet). Il y a eu beaucoup de réflexions, avec des joueurs d'expérience, des joueurs en forme du moment et des jeunes à gros potentiel qu'on pense être capables de devenir les champions de demain. Il faut changer de génération. Certains joueurs ont tenu la baraque pendant des années mais ne sont plus là aujourd'hui, comme William Servat, Julien Bonnaire, Lionel Nallet et Sébastien Chabal. D'autres sont blessés comme Imanol Harinordoquy, Dimitri Yachvili et Maxime Médard. Neuf ou dix tauliers ne sont plus là et il faut les remplacer. C'est une transition avec des challenges intéressants. Il faudra énormément d'enthousiasme et de solidarité. Le sprint est lancé pour la Coupe du monde.
« Gunther ? Un petit Chabal »
Comment allez-vous travailler à 33 joueurs ?
C'est plus facile de travailler à 33 plutôt qu'à 23 joueurs. Automatiquement, on a besoin de mettre en place une défense et on sait que ce sera très important face aux Australiens. Il faut travailler la conquête, et c'est plus facile avec deux paquets d'avants pour faire des oppositions. Pour l'animation offensive, on sait que c'est compliqué. Les clubs ont mis quatre matchs avant d'avoir une assise collectivement dans ce domaine. Nous, on n'aura que neuf jours. Pendant les trois premiers, on va essayer de bien travailler et d'optimiser notre temps. Ces trois jours seront importants. On aura un débriefing le dimanche soir et dix joueurs rentreront le lundi matin très tôt dans leurs clubs, puisqu’il y aura un doublon le week-end de France-Australie.

Vous avez retenu des joueurs originaires des iles comme Tolofua et Vahaamahina. Pourquoi ?
Ces joueurs sont capables de casser les plaquages et de jouer dans la défense. Au très haut niveau, on ne peut pas jouer que devant la défense, mais aussi dans la défense. Il faut avoir des joueurs capables de faire des cadrages-débordements, de rentrer dans les murs et faire des passes après contacts. On cherche des gros potentiels, des mecs capables de faire ça et de répéter ces actions. Ils ont des capacités physiques exceptionnelles et sont très dynamiques. Ils ont généralement de bonnes mains. Ils commencent à être titulaires dans leurs clubs de Top 14. On a besoin de les voir avec nous et de leur montrer les ingrédients pour le très haut niveau dans le travail, l'hygiène de vie et la musculation. Il faut essayer de leur mettre un coup de boost pour qu'ils évoluent rapidement. Le talent ne suffit plus. Il faut aussi énormément de travail.

A Toulon, vous avez entraîné Pierrick Gunther, qui vient lui de Roubaix. Comment le jugez-vous ?
Il avait des points forts voilà trois ou quatre ans, mais il s'est mis à travailler. Quand je suis arrivé à Toulon, je me suis dit : « tiens, c'est un petit Chabal ». Il avait sa première séance de musculation à 6h30 du matin. C'est aujourd'hui un beau bébé mais il a travaillé pour ça, avec trois ou quatre séances de musculation par semaine depuis trois ans. Il s’améliore au niveau technique avec ses entraîneurs. Un système a été mis en place à Toulon, au centre de formation. Il arrive à jouer et à être titulaire avec des joueurs comme Van Niekerk, Lobbe, Armitag. Ce qui se fait de mieux au monde. Le RCT n'a pas eu autant de sélectionnés en équipe de France depuis longtemp. Mais ils sont régulièrement titulaires au sein de cette équipe qui est leader en Top 14.

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