PAROLES D’AILLEURS – De Rio à Paris, témoignage d’une …


PAROLES D’AILLEURS – De Rio à Paris, témoignage d’une Brésilienne en France

Chmily est une jeune française expatriée en Argentine. Elle a consacré sur son blog, "Chmily en Argentine", une série aux témoignages d’expatriés étrangers vivant en France : "Paroles d’ailleurs". Voici celui de Barbara della Rovere, une Carioca mariée à un Français et vivant à Paris depuis un an.

Lorsque j’ai été invitée à écrire une note pour le blog de Chmily, j’ai pris le temps de réfléchir car ce n’est pas très facile de parler de ce sujet : une vie hors de son pays, une expatriation qui n’est pas imposée mais choisie.

J’ai décidé de quitter le Brésil et de venir vivre en France quand Grégoire (mon conjoint) et moi nous nous sommes dit que c’était le bon moment pour vivre ensemble. Ça s’est fait assez rapidement et à l’époque je n’avais qu’une envie : aller à Paris. Je portais cette ville dans mon cœur.

Ceux qui ne se sentent pas à leur place, à eux de partir
Cela fait un an que je suis là et l’impression que j’avais que Paris était le meilleur endroit du monde a beaucoup changée. Pour que vous sachiez déjà où j’en viens avec mon histoire : oui, j’aimerais bien déménager. Car même si j’avais déjà l’expérience d’avoir vécu ailleurs, et d’avoir des étrangers dans ma famille, la façon de penser de cette ville est assez éloignée de ma façon de penser. Et comme on dit au Brésil : ceux qui ne se sentent pas à leur place, à eux de partir. Ça ne veut pas dire que je suis malheureuse, au contraire. J’ai tout le bonheur du monde avec l’homme que j’aime et je ne quitterais cette ville qu’à condition que ce soit ma main dans la sienne. Sinon, je reste.

Avant de venir en France, un ami à moi, français, m’a dit que je ferais mieux de ne pas venir, au risque de finir comme les Françaises dans le métro, toujours sérieuses… Je peux vous assurer que je n’ai pas changé du tout. Je continue à montrer ma langue aux enfants, à donner ma place aux personnes âgées et à donner de l’argent aux musiciens qui font mon bonheur, même si je me rends bien compte que la plupart des gens autour de moi préféreraient que le monsieur qui joue de l’accordéon soit dans un autre wagon…

J’apprécie les bonnes manières françaises
J’essaie très fort et tous les jours de m’adapter et je crois que je le fais très bien. J’apprécie les bonnes manières françaises mais parfois j’ai juste envie de faire comme chez moi, de m’asseoir sur n’importe quelle chaise à table, de servir moi-même mon repas, de faire ma tartine, de ne pas être obligée de boire avant de manger, de pouvoir assaisonner ma propre salade. J’aimerais aussi pouvoir parler plus sereinement sans m’attendre à être corrigée à chaque erreur de français, chaque faute de grammaire. Je me dis que pour me venger je pourrais aussi bien corriger l’accent des Français quand ils parlent anglais, mais ce n’est pas comme ça que je fonctionne. Je m’étonne aussi qu’à une soirée d’anniversaire il n’y ait pas de gâteau et que tout ce qu’il y ait à manger tout le temps soit des "apéros" !

Essayer de se faire des amis en France ? C’est facile avec les étrangers mais se faire un ami français ça prend beaucoup plus de temps ! Même pour s’intégrer au groupe d’amis de mon conjoint c’est compliqué, je sens toujours un peu de méfiance dans le regard. Avant cela me blessait, mais plus maintenant. Ce qui a changé c’est qu’avant je fréquentais tout le monde, même si ça se passait mal. Désormais, je fréquente qui je veux. Et si ça risque de m’isoler ? Oui, peut-être, mais tant pis, je n’ai jamais eu à "forcer" qui que ce soit à m’aimer.

J’ai peur de devenir une immigrante triste
Chez moi tu peux aller chez quelqu’un sans passer de coup de fil pour prévenir, ça ne gêne personne au contraire, c’est un plaisir. Si tu veux dormir chez quelqu’un et qu’il n’y a pas de lit, tant pis, on se débrouille, on arrange un matelas par terre. On dit qu’il suffit qu’il y ait des portes fermées et tout se transforme en chambre.

J’ai peur de devenir une immigrante triste, qui parle toujours de son pays. Mais quitter son pays pour s’installer ailleurs, peu importe où, donne toujours une sensation de vide et c’est là, en étant dans la position d’expatriée que je comprends mieux mes amis étrangers qui vivent au Brésil et râlaient beaucoup là-dessus.

Paris, une ville de laquelle on tombe amoureux
Malgré tout, la ville me surprend, elle est belle, magnifique. J’adore penser que j’habite dans la ville où a vécu Gertrude Stein, Ernest Hemingway, Sylvia Beach et tous ces autres étrangers magnifiques qui ont fait de ce pays "une fête". J’adore la surprise, lorsque je marche dans une rue que je ne connais pas, de découvrir un panneau indiquant que quelqu’un d’important à vécu ici. J’aime aussi prendre mon magazine Vogue et aller au Café de Flore toute seule, juste pour lire tranquillement et voir la vie qui défile, imaginer les histoires de chacune de ces personnes qui se promènent ou qui font des photos, là en face.

J’adore aussi courir au Champ de Mars et m’étonner à chaque fois de voir la Tour Eiffel. C’est vrai que c’est une ville de laquelle on tombe amoureux. Peut-être que dans quelques années, quand je ferais un nouveau bilan il sera différent, avec moins de blessures, mais pour l’instant c’est comme ça. Mais j’ai de l’espoir. J’ai espoir en la nouvelle génération, qui a décidé de partir loin de l’Europe et qui peut-être un jour reviendra dans ce pays en amenant un peu du bonheur que les Français semblent avoir oublié…

Barbara DELLA ROVERE – Chmily en Argentine (www.lepetitjournal.com – Brésil) mercredi 28 mai 2014

- Lire l'intégralité de l'article sur le blog "Chmily en Argentine"

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