Mariano Pensotti clôt en beauté le focus argentin du Festival d …

Une pièce à la fois existentielle et pleine d'humour de Mariano Pensotti, "Cuando vuelva a casa voy a ser otro", a conclu en beauté le focus argentin du Festival d'Avignon (sud de la France), avec trois auteurs du théâtre porteno indépendant.

Très applaudie dans un festival marqué par beaucoup de déceptions, "Quand je rentrerai à la maison, je serai un autre" emprunte beaucoup au cinéma: un tapis roulant disposé sur la scène crée une sorte de travelling, et les titres des séquences apparaissent comme dans les films muets, dans un tableau lumineux au dessus de la scène.

"Cela m'intéresse de voler des idées et des procédés au cinéma et de les utiliser dans une forme très théâtrale", a confié Mariano Pensotti, 40 ans, à l'AFP.

La pièce s'inspire de sa propre histoire familiale: son père, militant de la gauche argentine, avait enterré dans le jardin des grands-parents des objets et documents compromettants pendant la dictature. Des années plus tard, il revient les chercher mais ne trouve plus les sacs plastiques enterrés. C'est le nouveau propriétaire de la maison qui les découvre en creusant une piscine. "Les objets ressurgissent comme une capsule du passé", dit-il.

"Ce n'est pas une oeuvre sur la dictature ou sur le passé, mais plutôt sur le présent et la mythologie familiale." Plusieurs histoires se croisent, avec des personnages qui sont tous, d'une façon ou d'une autre, à la recherche de leur identité: Natalie, chanteuse de rock réduite à faire la sono des mariages, et qui redécouvre un enregistrement des chansons de son père assassiné par la dictature grâce aux fameux sacs enfouis. Manuel, qui n'a connu le succès qu'une fois, il y a 15 ans, et remonte sa pièce culte. Marian, qui n'est bien que dans le mensonge et l'identité d'autrui.

Ponchos argentins

La réflexion sur l'identité et le double ne tombe jamais dans la nostalgie grâce à un humour ravageur, très caractéristique de Buenos Aires, et qui a plu au public français. Pour moquer le retour aux chansons des années 70 de Natalie, ses comparses du groupe de rock suggèrent de "mettre tous des ponchos", déclenchant les rires.

Mariano Pensotti est largement diffusé en Europe, avec des pièces comme "Cineastas" ou "El pasado es un animal grotesco".

Deux autres auteurs, également caractéristiques de la jeune scène argentine née dans les années 90 en pleine crise économique, étaient présents dans le festival.

Claudio Tolcachir, fondateur du théâtre école "Timbre 4" en 1999 à Buenos Aires a voulu "raconter une histoire sans presque recourir à la parole" avec le destin de trois femmes réunies par le hasard dans une caravane perdue au milieu de nulle part. Sa pièce, "Dinamo" entame après Avignon une tournée mondiale, en France, en Espagne, au Chili, au Brésil et au Pérou.

En début de festival, Sergio Boris, connu pour ses descriptions plutôt crues de marginaux de Buenos Aires ("Viejo, solo y puto") avait présenté avec les élèves de l'école de théâtre de Bordeaux "El Syndrome": le portrait d'une petite communauté de Français refusant de rentrer au pays et vivant dans une sorte de terrain vague.

La pièce, peu convaincante, a peut-être pâti de ses conditions de répétitions (trois semaines), très courtes pour un auteur qui prépare généralement ses pièces pendant deux ans.

"Le matériau principal est le corps de l'acteur, ça demande beaucoup de temps de répétition, c'est notre luxe principal", dit-il. "La scène argentine est très diverse, très vivante, mais pauvre, nous ne sommes pas subventionnés. La pauvreté des moyens est aussi stimulante", assure-t-il.

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