Alejandro Sabella: «Je suis une personne équilibrée et j’aime les équipes équilibrées.» © Keystone
20.06.2014
coupe du monde • Le sélectionneur de l’équipe d’Argentine a réussi son pari: Messi évolue au même niveau avec son pays qu’avec le Barça.
«Eurêka!» Alejandro Sabella, inconnu hors de son pays, a élucidé un des plus grands mystères du football de ces dernières années: il a su bâtir une Argentine dans laquelle Lionel Messi brille enfin et évolue au même niveau qu’au FC Barcelone. Sabella, 59 ans, a pris les commandes de l’Albiceleste en 2011, au sortir d’une Copa America ratée (quart de finale) devant son public et qui a coûté sa place à Sergio Batista. A son actif, une belle période passée à la tête de l’Estudiantes La Plata, un club de seconde zone qu’il a emmené au sacre continental en 2009 puis au titre national en 2010. Ses talents de fin tacticien impressionnent alors la Fédération argentine.
Possédant une science du jeu au-dessus de la moyenne, Sabella affichait le profil idoine pour trouver une solution au problème récurrent de la sélection: mettre enfin Messi en valeur autant que l’attaquant l’est au Barça. Car la Puce a souvent déçu avec l’Albiceleste, créant l’incompréhension d’un pays attendant beaucoup plus du meilleur joueur du monde. Sabella, antithèse de l’exubérant et excessif Diego Maradona, n’a pas réussi pareil tour de force en un claquement de doigts. Son Argentine, il l’a façonnée petit à petit jusqu’à trouver la bonne formule.
Une force de frappe
S’appuyant sur la base existante, le sélectionneur a mis sa patte sur l’équipe peu à peu, focalisé en premier lieu sur le remplacement de la charnière Demichelis-Burdisso par celle composée, aujourd’hui, de Garay et Fernandez. Une fois cette transition réalisée, Sabella s’est attelé à rentabiliser le talent incommensurable de Messi. «Il y a deux choses qui me dérangent, expliquait le sélectionneur au début de son mandat, que l’équipe adverse arrive facilement devant notre défense, et ne pas avoir de force de frappe. Le plus difficile est d’avoir ces joueurs qui font la différence dans les trente derniers mètres. Nous les avons. Maintenant, ce qui faut trouver, c’est un équilibre.»
L’organisation repose sur un tandem de récupérateurs expérimentés (Mascherano-Gago) et, bien entendu, sur les «Quatre fantastiques» Messi, Sergio Agüero, Gonzalo Higuain et Angel Di Maria, ce dernier étant le garant de l’équilibre de l’édifice. Et, dans cette constellation de talents, Messi a semble-t-il enfin trouvé sa place, jouant tour à tour les buteurs, les passeurs et même les travailleurs de l’ombre, quand il s’efforce de créer des espaces pour ses partenaires. «Le leader de l’équipe, c’est Messi, et tous sont derrière lui», se réjouit Sabella. «C’est notre porte-drapeau, notre référence. Le groupe vit bien, c’est quelque chose qu’on sent dans le vestiaire.»
Carlos Tevez évincé
Alejandro Sabella, disciple de Carlos Bilardo qui avait conduit Maradona et Cie au titre mondial en 1986 et longtemps assistant du champion du monde 1978 Daniel Pasarella, est également un homme à poigne, et n’hésite pas à prendre des décisions impopulaires. Comme l’éviction de Carlos Tevez de sa liste de 23 pour le Brésil, alors que l’attaquant a terminé meilleur buteur de la Juve cette saison et qu’une grande campagne réclamant son retour a sévi en Argentine. Le souci, pour Sabella, est que Tevez est incompatible avec Messi sur le terrain mais aussi en dehors. Alors, plutôt que de fragiliser son 4-3-3 et de brider à nouveau sa star, le sélectionneur a tenu bon et est resté fidèle à ses principes de jeu. «Je suis une personne équilibrée et j’aime les équipes équilibrées», se justifie-t-il ainsi régulièrement. si