Quantum, géré par le « family office » de Soros, et d’autres fonds ont lancé une procédure contre Bank of New York Mellon, qui, à la demande des juges américains, bloque l’argent dû par Buenos Aires
Le feuilleton de la dette argentine connaît un nouveau rebondissement, qui implique plusieurs stars du monde de la finance. Selon Bloomberg, Quantum, le fonds géré par le « family office » du milliardaire George Soros , qu’on sait très impliqué en Argentine, et Hayman, le fonds de Kyle Bass, ont pris la tête d’un groupe de créanciers mécontents. Ce groupe détiendrait des obligations argentines pour un total d’environ 1,3 milliard d’euros.
Procédure de Quantum et Hayman contre Bank of New York Mellon à Londres
Ces investisseurs n’ont pas pu être payés par Buenos Aires, à la suite de la décision de la justice américaine, qui a provoqué le défaut de paiement du pays le 30 juillet. En effet, le juge qui a sommé l’Argentine de payer les fonds « vautours » avant de rembourser les créanciers ordinaires (ce que le pays a refusé, préférant ainsi faire défaut), a aussi interdit tout transfert d’argent de la part de Bank of New York Mellon, la banque chargée d’exécuter les remboursements obligataires de l’Argentine. Les créanciers dont les titres ne relèvent pas du droit de New York* n’ont pas bénéficié d’un traitement spécial.
C’est précisément ce point que dénoncent Quantum et Hayman, qui ont lancé une procédure contre Bank of New York Mellon à Londres. Selon eux, avec des titres relevant de la juridiction britannique, il n’y a aucune raison qu’ils soient les victimes collatérales du bras de fer qui oppose l’Argentine aux fonds « vautours », comme on surnomme ces fonds qui achètent des dettes à prix cassé et dégagent de juteux profits en intentant des procès aux débiteurs. La bataille judiciaire entre Buenos Aires et les fonds « vautours » porte en effet sur des créances spécifiques, celles qui se réfèrent au droit de New York. Pourtant, à en croire Bank of New York Mellon, là n’est pas le problème : la banque américaine dit être tenue d’obéir aux juges américains du fait de son rôle d’agent fiduciaire de l’Argentine.
Quantum et Hayman ne sont pas les seuls à avoir été victimes du défaut de paiement de l’Argentine, alors même qu’ils ne détenaient pas des titres de dette en droit de New York. Les porteurs d’eurobonds (argentins) ont demandé au juge américain de revoir sa position et de permettre le remboursement de leurs titres. En vain.
Révocation de Bank of New York Mellon par l’Argentine
Agacé par l’attitude de Bank of New York Mellon, le chef de cabinet de la présidente Cristina Kirchner, Jorge Capitanich, a annoncé ce mardi matin la révocation de l’établissement. La banque se voit donc retirer l’agrément qui lui permettait d’avoir une activité en Argentine.
Le pays est en train d’abattre ses cartes. La semaine passée, le gouvernement a déposé un projet de loi pour permettre un échange de dette : tous les créanciers de l’Argentine auront la possibilité d’échanger leurs titres en droit étranger contre de nouveaux, en droit argentin. Une manoeuvre destinée à contourner une fois pour toute la justice américaine. Le juge Griesa, en charge du dossier à New York, l’a d’ailleurs qualifiée d’ « illégale ».
Près d’un mois après la faillite du pays, l’espoir d’une solution négociée avec les fonds « vautours » avant la fin du mandat de Cristina Kirchner (fin 2015) s’est donc quasiment envolé.
* Un Etat peut choisir de se référer à une juridiction étrangère dans ses contrats de dette. Le droit de New York et le droit britannique sont les plus courants, car ils sont bien connus des investisseurs et sont censés mieux les protéger. Le choix de la devise dans laquelle un Etat émet est indépendant de la juridiction. Les fonds « vautours » qui ont obtenu gain de cause devant la justice américaine avaient pris soin d’acheter des titres argentins relevant du droit de New York.
I.Co
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