L’Argentine vote une loi sur sa dette qui embarrasse Paris

L’Argentine proposera à ses créanciers d’être remboursés en France.

La France se retrouve à nouveau mêlée aux affaires argentines. Hier, les parlementaires argentins ont voté une loi qui permettrait à Buenos Aires de contourner la justice américaine : celle-ci impose à l’Argentine de ne pas rembourser ses créanciers ordinaires tant qu’elle ne rembourse pas aussi les fonds vautours . C’est cette injonction qui a conduit le pays au défaut de paiement fin juillet.

Parade

Pour sortir de cette impasse – la présidente Cristina Kirchner refusant catégoriquement de verser un dollar à ces fonds spéculatifs –, le Parlement a approuvé une loi pour délocaliser le remboursement des titres obligataires hors du périmètre du juge de New York. La parade est la suivante : les créanciers pourront échanger leurs titres en droit étranger contre de nouveaux, libellés en droit argentin ou... français. De même, les porteurs de titres pourront choisir d’être remboursés en Argentine ou en France.

Embarras à Paris

Un scénario qui met Paris dans l’embarras. « 
La France n’est pas à l’origine de cette idée
», assure-t-on à Bercy. «  Nous n’avons pas non plus été sollicités par les Argentins. » De fait, un Etat étranger n’a pas besoin de l’aval d’un pays tiers pour utiliser sa juridiction. Sauf que, concrètement, la solution argentine peut poser problème. « 
On a bien vu avec l’affaire BNP Paribas que le droit américain est extraterritorial
», souligne un connaisseur. La justice américaine a jugé illégale la manœuvre de Buenos Aires et interdit à toute entité de droit américain d’aider l’Argentine à payer ses créanciers tant que les fonds vautours ne touchent rien. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’Argentine a révoqué BNY Mellon et nommé l’argentin Banco de la Nacion comme agent de paiement . Pour effectuer des remboursements en France, il lui faut aussi trouver des intermédiaires financiers ici. « 
Est-ce que des établissements, banques, chambre de compensation, etc., accepteront de travailler pour l’Argentine et de ­contrevenir aux décisions de la justice américaine ? » s’interroge le spécialiste. On peut en douter. En particulier pour les acteurs qui ont des activités outre-Atlantique et qui risquent d’être accusés d’« outrage au tribunal » par les Etats-Unis. «
Même la Banque de France aurait du mal à jouer seule le rôle d’interface avec les créanciers », poursuit-il. En outre, l’institution ne peut se retrancher derrière son immunité pour ce type d’activités...

Arrêt de la Cour de cassation

Paris est pris entre le marteau et l’enclume. Il a jusqu’ici soutenu Buenos Aires contre les fonds vautours, en l’appuyant auprès de la Cour suprême américaine et en empêchant, par un arrêt de la Cour de cassation, des saisies de biens argentins dans l’Hexagone. Difficile dès lors de se défiler. La seule issue serait en fait que l’opération d’échanges de titres ne rallie pas suffisamment de créanciers et échoue. La France espère sans doute que les choses se dérouleront ainsi.

VIDEO L’allocution de Cristina Kirchner qui explique comment elle veut « sauvegarder le versement aux créanciers qui ont accepté les restructurations de dette de 2005 et 2010 » :


L’Argentine propose de payer sa dette en France

I. Co, Les Echos

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