Gagner au Brésil ? L'Argentine ne peut espérer mieux pour renouer avec un succès en Coupe du monde. Après les désillusions des dernières éditions, les Argentins refusent de s'emballer face aux chances de victoire de leur sélection nationale, qui sort de deux éliminations prématurées consécutives (2006 et 2010) en quarts de finale, chaque fois face à l'Allemagne.
Mais au pays de Léo Messi, certains rêvent, bien que secrètement, d'une finale. Et pourquoi pas face aux hôtes brésiliens, voisins et meilleurs ennemis. En janvier dernier, Página 12 s'était risqué à une chronique au titre évocateur : "2014, l'année d'un possible Maracanazo", en référence à la victoire de l'Uruguay en finale de la Coupe du monde 1950 face au Brésil, au stade Maracana. Pour ce journal, l'Argentine pourrait bien jouer les trouble-fêtes en terres cariocas.
Les souvenirs de México 1986 reviennent aussi en force, année de la deuxième et dernière Coupe du monde remportée par l'Argentine, face à l'Allemagne en finale (3-2). Et tous les prétextes sont bons pour faire référence à l'ère Maradona, capitaine de la sélection en 1986 et qui était alors joueur de Naples. Gonzalo Higuaín, titulaire en sélection et avant-centre du club napolitain, rêve d'avoir le même destin que le Pibe de Oro : "Je veux faire comme Maradona, d'abord gagner le Mondial au Brésil et après le Scudetto [championnat italien] avec Naples", peut-on lire dans les colonnes de Página 12.
L'absence du "joueur du peuple"
Si l'Argentine peut espèrer aller loin dans ce Mondial, ce sera sans Carlos Tévez, absent de la liste des 30 joueurs pré-sélectionnés par Alejandro Sabella. Une absence d'autant plus remarquée que l'attaquant, adoré par ses compatriotes et récemment sacré champion d'Italie avec la Juventus Turin, apparaît dans la vidéo de l'hymne officiel du Mondial brésilien (à 3'27''). Le quotidien sportif Olé résume la déception du pays : Tévez est "l'absent du peuple".
"73 % des sondés ne sont pas d'accord avec la mise à l'écart de Carlos Tévez", selon une enquête menée par le journal Clarín, qui confirme le soutien exprimé envers celui qu'on surnomme El Apache. "Les entraîneurs ont leurs raisons, que le cœur d'une bonne partie d'un peuple amoureux du football ('futbolero') ne peut comprendre", tempère le quotidien.
"Alors pourquoi n'est-il pas dans la liste ?", s'interroge Clarín. Les raisons du choix de Sabella pourraient être extra-sportives : "A voix basse, on assure que sa contrariété face à l'adversité complique la cohabitation avec les autres joueurs." "Et comme cette sélection est construite autour de [Lionel Messi], il n'y a pas de place pour la moindre petite ombre", poursuit le journal.
"Un Mondial de préoccupations"
Mais au-delà de l'enjeu sportif, ce Mondial brésilien est aussi l'occasion pour des milliers d'Argentins d'aller supporter leur équipe nationale sur place, du fait de la proximité géographique. Les chiffres officiels de la Fifa parlent de près de 60 000 billets distribués aux Argentins, ce qui en fera la cinquième nation la plus représentée.
En marge de la ferveur populaire, la présence des barras bravas argentines (groupes de supporters "ultras") mobilise l'ensemble des médias. L'arrivée de ces supporters, réputés violents, est "la plus grande préoccupation des autorités brésiliennes", selon Canchallena, la section sportive du quotidien La Nación.
C'est l'interview donnée par le supporter Brésilien "Giba" Bitencourt Viegas à la chaîne sportive argentine TyC sport qui a allumé la mèche. Face aux caméras, ce leader de la barra brava de l'Internacional de Porto Alegre a assuré avoir tout organisé pour loger 1 200 "ultras" argentins et leur offrir 200 entrées pour chaque match de la sélection argentine. Clarín va jusqu'à parler d'"un Mondial de préoccupations". Selon le quotidien argentin, le gouvernement brésilien est prêt à déployer "un dispositif record de 180 000 agents de sécurité".
Lors du précédent Mondial, 29 supporters argentins avaient été expulsés d'Afrique du Sud, et un "ultra" était mort des suites d'une bagarre.
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