L’Argentine sous pression des Fonds vautours met en cause la …

L'Argentine, confrontée à un nouveau défaut de paiement sur sa dette, certes partiel mais aux conséquences imprévisibles, crie à l'injustice, met en doute l'indépendance de la justice des Etats-Unis et menace de saisir la justice internationale.

Les négociations de ces derniers jours à New York, entre une délégation gouvernementale argentine et des fonds "vautours" ont échoué et l'espoir d'une solution passant par des banques privées argentines ayant proposé de racheter la dette, s'amenuisait jeudi, mais des banques internationales entraient en jeu, selon la presse.

Le juge américain Thomas Griesa, en charge du dossier fonds "vautours"-Argentine depuis 10 ans, a convoqué une nouvelle réunion pour vendredi à New York.

"Si le juge est un agent des fonds spéculatifs, si le médiateur (judiciaire) est un agent à eux, de quelle justice parle-t-on ? Il y a dans cette affaire une responsabilité de l'Etat, des Etats-Unis, qui doivent garantir les conditions d'un respect sans restrictions de la souveraineté des pays", a déclaré mercredi le chef du gouvernement argentin Jorge Capitanich.

L'Argentine envisage de saisir des instances judiciaires internationales "pour faire valoir ses droits", a assuré M. Capitanich, "cela ne peut pas continuer indéfiniment".

Dans un pays déjà fragilisé par la récession, 30% d'inflation et un déficit budgétaire, l'inquiétude monte, même si la situation est loin d'être aussi grave que lors de la crise de 2001.

Le défaut de paiement porte sur 539 millions de dollars, bloqués dans une banque de New York par une décision judiciaire, mais Buenos Aires continue de payer ses autres créanciers, alors qu'en 2001, l'Argentine s'était déclarée en défaut pour 82 milliards de dollars.

Les discussions à New York ont tourné au dialogue de sourds. Les fonds "vautours" et le juge Thomas Griesa ont mis en avant que l'Argentine devait respecter la loi des Etats-Unis et appliquer un jugement l'ordonnant de payer 1,3 milliard de dollars à deux fonds américains.

- Défaut sélectif-

De son côté, l'Argentine martèle que si elle signe le chèque demandé, elle viole une clause figurant dans les contrats de la dette restructurée en 2005 et 2010 libellés à New York, spécifiant qu'elle devait offrir les mêmes conditions à tous les créanciers.

La décision de la justice américaine ordonnant à l'Argentine de payer 100% de la valeur des bons à NML et Aurelius contrevient à cette clause, car 93% des créanciers restructurés touchent environ 30% des sommes initialement dues.

Le gouvernement argentin a choisi de ne pas payer les 1,3 milliard de dollars redoutant de déclencher une avalanche de réclamations des autres créanciers auxquelles Buenos Aires ne pourrait pas faire face.

L'agence de notation Standard and Poor's (SP) a abaissé la note de l'Argentine d'un cran à "défaut sélectif", ce qui signifie selon SP que "l'emprunteur n'a pas honoré une certaine partie de ses obligations ou une émission spécifique mais qu'il continue de payer ses autres types d'emprunts dans les temps".

Buenos Aires risque désormais des mesures de rétorsion des fonds "vautours" qui ont tenté par le passé de faire saisir des biens argentins à l'étranger, mais aussi des créanciers qui n'ont pas reçu leur versement du 30 juillet.

"Le pays pénètre sur un territoire où il est impossible de prédire ce qui va se passer. Un défaut est un défaut, même s'il ne dure que quelques jours. Et ce sera pire, si cela dure", avance Joaquin Morales Sola, éditorialiste du quotidien conservateur La Nacion à Buenos Aires.

Le pays ne sombrait pas pour autant dans la panique. Sur les télévisions argentines, c'est la mort du dirigeant historique du football argentin Julio Grondona qui fait la Une de l'actualité depuis mercredi à la mi-journée, avant le défaut de paiement.

"Mauvaise finance"

Selon les analystes, une des premières conséquences du défaut de paiement est de maintenir l'Argentine à l'écart des marchés internationaux des capitaux. Depuis sa faillite en 2001, l'Argentine a progressivement remboursé sa dette grâce notamment à ses exportations agricoles, passant d'un endettement de 160% du PIB à 40% actuellement.

"S'il y a un accord rapide, l'impact sur l'économie argentine sera relativement limité", estime la banque française Natixis dans une note. "Mais le coût d'un défaut prolongé sera substantiel", ajoute-t-elle.

Jeudi déjà, le groupe français de distribution Carrefour a annoncé qu'il réduirait ses investissements dans ce pays.

Pour le fonds NML, appartenant au milliardaire républicain américain Paul Singer, "pendant ce processus, le médiateur a proposé diverses solutions innovantes, plusieurs d'entre elles étaient acceptables selon nous. L'Argentine a refusé de les envisager sérieusement, et a choisi à la place d'aller au défaut".

"Je suis extrêmement choqué" par l'issue de cette affaire, "la justice américaine juge selon ses propres canons (...) Cela remet en cause une décision d'intérêt général", a dit à l'AFP le ministre français des Finances, Michel Sapin.

"Si on avait eu cette décision, on n'aurait résolu aucune crise" de dette publique dans le passé, souligne le ministre socialiste, pour qui les fonds "vautours" représentent "la mauvaise finance".

La présidente de centre-gauche Cristina Kirchner devait s'exprimer jeudi en fin de journée.

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