Pilar Gamboa, toujours aussi exceptionnelle dans «Fauna» /DR
La maturité de son écriture a de quoi surprendre. Difficile d’imaginer que «Fauna», présenté ce soir encore au théâtre Garonne, est la pièce écrite par l’Argentine Romina Paula, frêle jeune femme à l’allure adolescente qui est venue saluer le public à la fin de la première représentation, mercredi. Pièce sur Fauna, mythique et rêvée femme libre vivant début XXème, en Argentine, qui à la manière de George Sand se serait habillée en homme pour pouvoir aller à l’Université et avoir une vraie vie culturelle, «Fauna» est d’abord une pièce hantée par le cinéma. Dans le but de réaliser un film sur la vie de cette amazone, un réalisateur et son actrice se rendent chez ses enfants, vivant isolés dans la pampa argentine, pour faire des repérages et évoquer la vie de cette femme hors pair aujourd’hui disparue. Des souvenirs sont racontés, des futures scènes du film répétées. Et l’esprit Fauna peu à peu , imprègne chaque participant...
à la fois une mise en abîme du cinéma, du théâtre, de la nature et fonction même de l’acteur, de la valeur de la représentation d’ une vie en images plaquées, forcément plaquées, de la façon dont se construit une légende, «Fauna» déroule également, dans une vertigineuse et troublante douceur, un questionnement sur l’identité, la part féminine et masculine qui est en chacun de nous, les chemins et les visages différents que prend, pour chacun, l’amour.
Subtilement, comme une image qui se transforme, se dédouble et montre son secret, les comédiens inversent les rôles qu’ils répètent, le réalisateur joue Fauna, le fils de Fauna interprète son père, faisant ainsi bouger toutes les lignes de l’identité sur un mode incarné.
Les comédiens de la Cie El Silencio sont tous excellents, -Pilar Gamboa, en tête - avec ce naturel délicat, profond et retenu comme il doit
l’être et que l’on avait découvert, bouleversés, l’an passé avec «El Tiempo todo entero», incroyable version de «La Ménagerie de Verre» également présentée au Garonne.
Au théâtre Garonne, 1, av du Château d’Eau, samedi 30 novembre à 20 h 30.Tel : 0 562 485 477.