En Argentine, la police de Buenos Aires sur la sellette

Martin Lanatta (au centre, sous un casque) arrive au tribunal de Buenos Aires, le 9 janvier 2016. C'est l'un des trois condamnés dans le triple crime de l'éphédrine.

Le gouvernement de centre-droit du président Mauricio Macri a limogé, le 12 janvier, sept hauts responsables de la police de la province de Buenos Aires, mis en cause dans des affaires de corruption et de trafics en tout genre. Ce n’est pas la première fois, en Argentine, que la police est sur la sellette, à la suite de nombreuses morts et disparitions, affaires de drogue et de prostitution, vols et enlèvements, dans lesquels sont impliqués des effectifs de la « Bonaerense », la police de la province de Buenos Aires, parfois appelée la « maudite police ». El Bonaerense était le titre d’un film sorti en France en 2003, réalisé par Pablo Trapero, chef de file du cinéma argentin.

En 1991, M. Macri lui-même avait été enlevé et séquestré pendant quinze jours par des policiers, avant d’être libéré contre le paiement d’une forte rançon, versée par son père, un riche entrepreneur. Le nouveau président argentin, qui a pris ses fonctions le 10 décembre 2015, a été confronté, au lendemain de Noël, à l’évasion spectaculaire de trois trafiquants de drogue et tueurs à gages, suivie d’une rocambolesque cavale pendant deux semaines. Cette chasse à l’homme, qui a dévoilé les carences des services de sécurité, a été suivie comme un feuilleton par les Argentins. L’insécurité est l’une de leurs grandes préoccupations. Au cours des dernières semaines, les cambriolages se sont multipliés dans les faubourgs aisés de Buenos Aires.

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Le 9 janvier, le président Macri avait annoncé l’arrestation des trois fugitifs, alors que seul l’un d’entre eux, Cristian Lanatta, était effectivement sous les verrous. L’opposition a pointé du doigt l’amateurisme du nouveau gouvernement. La ministre de la sécurité, Patricia Bullrich, a invoqué une erreur de communication au sein de la police. Des opposants ont parlé d’un accord entre fugitifs et policiers pour laisser filer les criminels. Les deux autres fugitifs ont fini par être capturés, le 11 janvier, à 500 km de Buenos Aires, dans la province de Santa Fe.

Les poursuites ont été ponctuées par de violents affrontements avec la police. Quatre agents ont été blessés par balles. L’évasion spectaculaire des trois hommes, qui sont sortis par la porte principale d’une prison de haute sécurité de la province de Buenos Aires, armés de pistolets en plastique, a révélé la corruption de l’administration pénitentiaire, des forces de sécurité mais aussi le refus de la « Bonaerense » de collaborer avec la police fédérale.

Les fugitifs avaient été condamnés à la prison à vie, en 2008, pour un meurtre retentissant, connu comme le « triple crime de l’éphédrine », commis dans la ville de General Rodriguez, près de Buenos Aires. Décongestionnant nasal, l’éphédrine entre également dans la fabrication de drogues de synthèse.

« Système pourri »

Ce crime avait pris une dimension politique pendant la campagne électorale de 2015, lorsque le chef de la bande, Martin Lanatta, avait impliqué Anibal Fernandez, le chef de cabinet de la présidente sortante, la péroniste Cristina Kirchner. M. Fernandez avait nié tout lien avec les trafiquants. « Le narcotrafic a avancé, comme jamais auparavant dans l’histoire argentine, à cause de l’incapacité et de la complicité du gouvernement » de Cristina Kirchner, a récemment affirmé M. Macri, ajoutant avoir hérité d’un « système pourri ».

Dénonçant des appuis « à la mafia du narcotrafic à l’intérieur et à l’extérieur de l’Etat », la nouvelle gouverneure de la province de Buenos Aires, Maria Eugenia Vidal, a élevé à 2 millions de pesos (137 000 euros), la récompense pour l’arrestation d’Ibar Esteban Perez Corradi, en fuite depuis 2010, accusé d’être l’auteur intellectuel du « triple crime ». Au cours de l’enquête, une piste conduisant à un cartel mexicain de la drogue avait été évoquée.

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