Réalisé par Pablo Trapero. Argentine/Espagne. Thriller. 1h48 (Sortie le 10 février 2016). Avec Guillermo Francella, Peter Lanzani, Lili Popovich, Giselle Motta (II), Franco Masini, Gastón Cocchiarale, Antonia Bengoechea et Stefanía Koessl.
Quand on a voulu fictivement créer une "nouvelle vague" argentine au début des années 2000, le nom de Pablo Trapero a été cité parmi les chefs de file. "El clan", son huitième film, a l'avantage d'être un grand thriller qui n'a rien à envier à ses homologues américains.
Pour la plupart des spectateurs français qui ignorent ce fait-divers qui a fait la "Une" de la presse argentine, "El Clan" de Pablo Trapero devrait les laisser pantois. Car ce n'est pas tous les jours que le crime prend les traits d'une famille bon chic bon genre, où chacun des membres, peu ou prou, participe à des actes d'une violence et d'une barbarie rares.
Filles blondes répondant aux critères de la haute-bourgeoisie, fils sportifs aux belles gueules de rugbymen, père habillé dans la dignité d'un patriarche qui pourrait être avocat ou politicien, mère aimante et attentionnée aux états d'âmes des uns et des autres, c'est une belle famille que la famille Puccio. Pourtant, l'envers du décor est aussi sordide que chez les Thénardier.
Tout dans "El clan" paraît dingue, excessif, inventé. Et pourtant, c'est vrai !
Fréquentant les milieux huppés grâce à Alejandro, son fils devenu l'une des vedettes des "Pumas", l'équipe d'Argentine de Rugby, Arquimedes Puccio cible les grandes fortunes et prépare des kidnappings audacieux.
Violent, sans pitié, pas forcément discret, "El Clan" multiplie les rapts crapuleux, n'hésitant pas à exécuter ses victimes. C'est à cent à l'heure, avec l'efficacité d'un Scorsese mais sans ses effets maniérés, que Trapero conduit ce récit.
Peu à peu, il y ajoute une dimension politique, car le destin des Puccio est lié à celle de la dictature : Arquimedes Puccio n'a-t-il pas ses entrées au sein de la police spéciale argentine ?
Comme dans les films italiens d'Elio Pietri ou de Francesco Rosi, ce clan sanguinaire apparaît le symptôme et l'agent d'un régime corrompu et l'on imagine toutes les basses œuvres que le gang Puccio a pu commettre en toute impunité pendant que régnait la junte militaire.
Film impressionnant, véritable tourbillon furieux, "El Clan" de Pablo Trapero peut convaincre un public divers. S'il était étasunien, il obtiendrait un grand succès. Fort de son Lion d'argent du meilleur réalisateur au Festival de Venise, on lui souhaite de capitaliser de nombreux spectateurs parmi ceux qui aiment le cinéma rapide, clair et qui sait raconter à tous une histoire vraiment incroyable et parasite de la grande Histoire.
La prestation de Guillermo Francella composant un Arquimedes Francella glaçant de méchanceté machiavélique restera dans les annales.