Disparition d’Eliseo Veron

Disparition d'Eliseo Veron, sémioticien argentin (1935-2014)

Lire sur le site du Monde l'article que lui consacre Paulo A. Paranagua sur son blog "America Latina (VO)":

"Ancien professeur des universités françaises, l'Argentin Eliseo Veron est mort à Buenos Aires, mardi 15 avril, à l'âge de 78 ans, à la suite d'un cancer. Auteur d'une vingtaine d'ouvrages, il a été un des pionniers des études en communication, en France et en Amérique latine.

Eliseo Veron est né à Buenos Aires, le 12 juin 1935. Il a fait des études de philosophie à l'Université de Buenos Aires. Après la licence (1961), il obtient une bourse qui lui permet de rejoindre le laboratoire d'anthropologie sociale du Collège de France, auprès de Claude Lévi-Strauss. Disciple éclairé de ce dernier, Eliseo Veron traduit à l'espagnol son Anthropologie structurale. Il fréquente aussi le séminaire de Roland Barthes à l'Ecole pratique des hautes études.

De retour en Argentine, Eliseo Veron enseigne au département de sociologie de l'université de Buenos Aires, jusqu'à l'intervention des militaires arrivés au pouvoir lors du coup d'Etat de 1966.

Le jeune professeur poursuit sa carrière universitaire en France. Il est directeur d'études associé à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS). Il dirige le département des sciences de l'information et de la communication à l'université de Paris 8, à Vincennes, puis à Saint-Denis, jusqu'en 1995. Il enseigne également à Bayonne et à Bordeaux, sans pour autant perdre le contact avec son pays : il préside l'Association argentine de sémiotique.

Ses ouvrages deviennent des références d'un côté comme de l'autre de l'Atlantique, à un moment où sémiologues, sociologues et anthropologues rivalisent pour donner leurs lettres de noblesse aux études sur la communication. Ainsi, Construire l'événement (éditions de Minuit, Paris, 1981) décrypte la couverture des médias français sur l'accident de la centrale nucléaire de Harrisburg.

Sa thèse, parue sous le titre La sémiosis sociale : Fragments d'une théorie de la discursivité (Presses universitaires de Vincennes, 1988), est un classique. Il y est revenu avec sa dernière publication, La semiosis social 2 (Paidos, Buenos Aires, 2013, non traduit). Avec Jean-Jacques Boutaud, il a publié Sémiotique ouverte : Itinéraires sémiotiques en communication (Lavoisier, Paris, 2007).

Eliseo Veron s'était intéressé à la communication politique, proposant notamment une analyse historique du discours péroniste, Peron o muerte : los fundamentos discursivos del fenomeno peronista, en collaboration avec Silvia Sigal (Legasa, Buenos Aires, 1986, non traduit). Il n'avait pas dédaigné l'analyse de la « telenovela »ni la communication d'entreprise, prodiguant ses conseils à diverses marques françaises.

Après sa retraite en 1995, il est revenu en Argentine, où il a continué à enseigner et surtout à écrire beaucoup. Lors du conflit entre le quotidien Clarin et le gouvernement Kirchner, il avait pris fait et cause pour le journal. Pourtant, il critiquait la prétention à l'objectivité journalistique et trouvait des qualités à l'ancien président Nestor Kirchner. Cela ne l'empêchait pas de penser que « le péronisme figure parmi les pires choses qui soient arrivées à l'Argentine ».

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