La présidente des « Grands-mères de la place de Mai », une organisation qui enquête sur les traces des enfants volés par la dictature militaire, a retrouvé un de ses petits-fils, 36 ans après.
« Je ne voulais pas mourir avant de le serrer dans mes bras. Je vais bientôt pouvoir l'embrasser. Je veux le toucher, regarder son visage ». Après 36 ans de recherches, Estela de Carlotto, figure historique des « Grands-mères de la place de Mai », vient de retrouver la trace de son petit-fils Guido, disparu comme des milliers d'autres pendant la dictature militaire (1976-1983). Émue mais souriante, l'infatigable militante de 83 ans a communiqué sa joie à une pléiade de journalistes et une vingtaine d'autres enfants d'opposants au régime, élevés par des parents adoptifs, au siège de l'organisation des « Grands-mères de la Place de Mai », dans le centre de Buenos Aires. Guido est né le 26 juin 1978, en prison. Il est aujourd'hui musicien et a eu, mardi, un premier contact téléphonique avec sa famille biologique. Sa mère, Laura, la fille d'Estela, était membre de la guérilla Montoneros, opposée au régime militaire. Elle fut torturée et exécutée d'une balle dans la tête.
500 bébés enlevés et livrés à l'adoption
Les « Grands-mères de la place de Mai » estiment que 500 bébés d'opposants politiques, enlevés à leur mère ou nés en captivité, ont ensuite été adoptés par des dignitaires du régime militaire qui a fait 30.000 morts ou disparus, selon les organisations de défense des droits de l'Homme. L'ONG, créée en 1977, oeuvre depuis le début de la dictature pour retrouver ces enfants « volés » et les rendre à leurs familles légitimes. Plus d'une centaine d'entre eux ont été identifiés et ont pu reprendre contact avec leur famille, après avoir été élevés par des parents qu'ils pensaient parfois être leurs véritables géniteurs. Engagée à poursuivre son combat pour la réunification des familles, Estela de Carlotto a lancé un message d'espoir à celles qui n'ont pas encore retrouvé l'enfant ou le petit-fils qu'elles recherchent depuis plus de 30 ans. « Dans cette maison, on ne dort pas. Ne vous découragez pas ».