Des couples gays au mondial de tango

Des couples d’hommes dansant sensuellement… Cette semaine, la scène s’est répétée et a bousculé la tradition au Mondial de tango de Buenos Aires . Pour la première fois de l’histoire de cette compétition phare, où se pressent les meilleurs danseurs du monde, trois couples d’hommes y briguent, jusqu’à fin août, le titre le plus prestigieux de la planète tango. Un univers plutôt macho et conservateur renvoyé de ce fait à ses origines...

Dans les bordels de Buenos Aires

Né dans les bordels de Buenos Aires à la fin du XIXe  siècle, le tango était dansé à cette époque entre messieurs soucieux de s’aguerrir avant de danser avec les prostituées.

D’abord méprisé, considéré comme une danse des bas quartiers, ce n’est qu’à la fin des années 1910 que le tango gagne en respectabilité en Argentine.

«Il y a une culture machiste. Mais des personnes âgées apprécient. Nous ne sommes pas dans la transgression, la société n’est pas prête. Le changement se fait lentement , estime Daniel Arroyo, 18 ans, sous le regard de Juan Pablo Ramirez, son partenaire, danseur professionnel de 34 ans. Nous respectons les codes et nous fréquentons les milongas (les salons traditionnels où on danse le tango, NDLR) sans les mouvements de jambes entremêlées. Notre but, c’est qu’on oublie que nous sommes un couple d’hommes et qu’on nous dise: quel talent! »

Les deux hommes ont vécu en couple mais leur séparation sentimentale n’a pas mis en péril le duo de danseurs. Pas de postures lascives, pour ne pas heurter les sensibilités ; ils dansent sobrement.

« Une liberté »

Dans une Argentine où le mariage gay a été légalisé en 2010, des milongas gays ont vu le jour à Buenos Aires. Aussi, le directeur du Mondial de tango Gustavo Mozzi, également compositeur et musicien, s’attendait à voir des couples d’hommes pointer le bout de leurs souliers, car aucune règle ne les a jamais empêchés d’y participer.

«Cela signifie qu’il y a une ouverture dans le circuit tango, remarque Gustavo Mozzi. De nouvelles générations prennent leur place; évolution, changement, vitalité. »

Marcelo Siufe, un infirmier de 41 ans, enfile ses chaussures à talon, indice traduisant qu’il sera conduit par son partenaire.

«La danse n’a pas de sexe, sourit-il. Autrefois, le tango se dansait entre hommes. Je peux danser avec ma sœur ou ma mère. Le tango est passion et fantaisie .»

Le tango, inscrit en 2009 au patrimoine mondial immatériel de l’Unesco, «est sentimental, amoureux, dramatique, c’est un art, une liberté », résume Juan Pablo Ramirez.

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