Colombie, l’autre outsider

Toute la Belgique s'est enthousiasmée à la lecture du
nouveau classement mondial. Enfin, nos Diables émergent dans le top ten d'une élite mondiale qu'ils
avaient trop longtemps désertée. Et puis, certains d'entre vous ont
certainement levé les yeux un peu plus haut, vers les cimes du classement. Là,
entre l'Allemagne et l'Argentine, la Colombie semble faire figure d'intrus. Sur
les douze derniers mois, les Cafeteros ont
pourtant marqué 792 points, soit plus que n'importe quelle autre nation. Même
mieux que nos Diables et leurs 784 unités. Mais qui sont ces Colombiens qui semblent
en passe de nous voler notre statut d'outsider de luxe du Mondial brésilien ?

 

Falcao et les autres

Quand on pense Colombie, on pense évidemment Radamel Falcao.
Le néo-monégasque postule au statut de meilleur 9 de la planète, et force est
de constater qu'il a une sacrée longueur d'avance sur la concurrence. El Tigre plante indifféremment du pied
droit, du gauche ou de la tête. Pas un hasard, donc, de voir que sept des
dix-sept roses plantées par les Cafeteros
depuis le coup d'envoi des qualifications portent sa griffe.

Mais, pour reprendre Mano Menezes, ex-sélectionneur brésilien
: "La Colombie, ce n'est pas que
Falcao"
. S'il n'a pas été clairvoyant au moment de bâtir sa sélection auriverde, force est de constater
qu'avec cette phrase, Mano a vu juste.

 

Super Pekerman

Plus que celle de Falcao, cette sélection colombienne est
celle de José Nestor Pekerman. L'homme qui avait mené son Argentine à trois
titres de champions du Monde des moins de vingt ans a repris les rênes jaune et
bleu au début de l'année 2012. La Colombie a alors loupé son départ dans la
course au Mondial 2014, avec un maigre 4 sur 9.

Et puis il y a donc Pekerman, un jeu séduisant, une équipe
disciplinée qui se crée des occasions à la pelle. Du football total, et 19
points sur 27 pour hisser les Cafeteros à
la deuxième place des qualifs de la zone AmSud,
trois points derrière l'Argentine, et avec un match en moins. Le tout grâce à
des choix très marqués du Mister, qui
est parvenu à transformer une somme de talents prometteurs en une véritable
machine à gagner.

 

Le fou de la Caraïbe

José Pekerman a une flopée d'attaquants monstrueux à
disposition pour seconder l'indéboulonnable Radamel.  Jackson Martinez, successeur de Falcao chez
les Dragons de Porto. Luis Muriel, bombe atomique de l'Udinese. Et même Carlos
Bacca, taureau doré de notre belle Pro League.  Du lourd, donc.

Et pourtant, le choix de José Pekerman se porte sur Teofilo
Gutierrez. Une boule de nerfs d'1m78, plus habitué aux coups de sang qu'aux
coups d'éclat. Un mec capable de pointer un flingue d'air-soft sur ses
coéquipiers au milieu du vestiaire. Faut dire qu'ils avaient osé lui reprocher
son énième expulsion de la saison, les salauds.

En sélection, Teofilo se tient à carreau. Sauf devant les
cages adverses, où il devient bestial. Cinq réalisations en éliminatoires, ça
calme. Alors, il a beau être barré par l'obscur Cristian Rodriguez dans le club
de Cruz Azul, Pekerman continue à lui faire confiance pour animer Baranquilla.
Dans ce petit port caribéen, loin de la froide Bogota, Teo est un dieu vivant. C'est dans cette véritable fournaise que
les Cafeteros étouffent leurs
adversaires depuis l'arrivée du Mister argentin.
Un bastion imprenable, où la bande à Falcao n'a pas encore concédé le moindre
but.

 

Une sélection
européenne teintée de couleur locale

Gutierrez fait figure d'exception dans une équipe dont la
majorité des joueurs évoluent sur le Vieux Continent. "De mémoire de sélectionné, je n'avais jamais connu un groupe dont
l'immense majorité joue en Europe"
précise ainsi ce vieux loup de
Mario Yepes, gardien improbable de la solidité défensive des Cafeteros en compagnie du véloce Perea
et des marathoniens du Calcio que sont Zuniga et Armero.

L'autre exception s'appelle Macnelly Torres. L'homme qui
envoie un certain Fredy Guarin, maillon fort de l'Inter, sur le banquillo. Il faut dire que Pekerman voulait un 10, un vrai. Un ersatz du Riquelme qui emmenait sa
magnifique Argentine du Mondial 2006. Et cet homme, c'est donc Torres. Un
joueur de 28 ans qui a toujours évolué sur le continent américain, mais que
l'icône nationale Carlos Valderrama avait adoubé comme son successeur.

Un choix gagnant de Pekerman, puisque le meneur de jeu
multiplie les caviars à l'adresse de Falcao, Gutierrez, et du virevoltant James
Rodriguez, diplômé avec grande distinction en cassage de reins et en frappes
surpuissantes du gauche.

 

La deuxième heure de
gloire ?

Avec toutes ces armes et la magie de Pekerman, la Colombie
semble bien partie pour se qualifier pour le Mondial, et pour faire sensation
au Brésil. D'autant plus que d'ici l'an prochain, les Cafeteros pourront peut-être bien compter sur Juan Quintero.
Gaucher, numéro 10 sur le dos, les comparaisons avec un certain Lionel Messi
affluent déjà pour qualifier un joueur qui a illuminé le Mondial U20 en
Turquie.

Le Colombien ne devrait pas faire de vieux os à Pescara, et
pourrait devenir le nouveau talent révélé par Pekerman, lui qui avait déjà
arraché Messi des griffes de la Roja en
convoquant la Pulga pour un match
amical bidon organisé uniquement pour le convaincre d'opter définitivement pour
l'Albicéleste.

Falcao, Quintero, Rodriguez et les autres marchent donc sur
les traces de leurs glorieux ainés qui avaient fait la réputation du football
colombien dans les nineties. La
sélection, emmenée par les René Higuita, Carlos Valderrama et autre Faustino
Asprilla, s'était alors qualifiée pour trois Coupes du Monde consécutives,
atteignant le deuxième tour en 1990 avant de craquer face au Cameroun de Roger
Milla.

Un quart de finale suffirait à la meute du Tigre pour faire mieux. Mais les
ambitions des Cafeteros ne
s'arrêteront pas à une place dans le grand huit. De là à imaginer une finale Belgique
- Colombie dans moins d'un an au Maracana, il y a un fameux pas. Mais les deux
nations sont prêtes à le franchir.

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