Départ Mendoza, Argentine. Arrivée Quimper, France. 11.000 kilomètres entre les deux villes et autant de distance entre le pays natal d'Ignacio et Analia et la ville dans laquelle ils vivent aujourd'hui. Il y a bientôt presque un an, ce jeune couple a décidé de changer de vie.
A respectivement 31 et 30 ans, les deux Argentins ont eu des envies d'ailleurs. Découvrir une nouvelle culture, un nouvel environnement, une autre manière de vivre, tout cela était à portée de main, encore fallait-il franchir le pas. Car laisser derrière soi sa famille, ses amis, sa vie professionnelle, ne se fait pas en un claquement de doigt.
Faire le grand saut, cela semble insurmontable, et pourtant... Le HuffPost C'est la vie vous propose de suivre l'itinéraire de quatre personnes qui ont décidé de changer de vie. Morgane, chargée de production dans l'art contemporain en CAP cuisine dans la prestigieuse école Ferrandi, Jean-François, responsable RH devenu loueur de bateaux et Ignacio et Analia qui ont quitté leur Argentine natale pour s'installer en Bretagne. Leurs portraits seront à lire tous les week-ends du mois de février.
En 2008, Ignacio avait déjà passé quelques mois dans le coin, à Saint Malo (Ille-et-Vilaine), pour un stage de fin de licence au sein de la rédaction technique de l'IUT de la ville. Il souhaitait vraiment découvrir le pays. De retour en Argentine, son esprit reste de l'autre côté de l'Atlantique. "J'ai rencontré des Français, ce qui a maintenu mon envie d'y retourner et, surtout, ce qui m'a aidé à ne pas perdre mon français", nous raconte-t-il. "J'étais également bénévole dans une association chargée d'accueillir les étudiants français venant faire leurs études dans ma province."
"Il fallait essayer, c'était le moment"
Pour Ignacio c'était donc une certitude: il voulait revenir. De la France il avait aimé "l'histoire, la stabilité", de la Bretagne "le côté mythique, l'accueil des gens".
L'idée commence alors à germer, et il en parle à sa petite amie Analia, qui est d'ailleurs aujourd'hui sa femme - tous deux sont mariés depuis 2013. "On a dû beaucoup en parler au début", nous confie-t-elle avec un français impeccable et un accent chantant. "Mais il fallait essayer, c'était le moment, on est jeunes, on n'a pas d'enfant, et je pouvais demander un congé d'un an, comme ça, si on revenait, je pouvais récupérer mon travail". Une sécurité qui facilite la prise de décision: après de longues discussions, le passage à l'acte. Le 29 mai 2014, tous deux atterrissent à Paris
Première activité française le jour même, la marche citoyenne contre le Front National, avec une amie qu'ils ont rencontré à Mendoza lorsqu'elle y faisait une année d'études en sciences politiques. Dépaysement immédiat!
"La France, c'est la bureaucratie!"
Ils veulent par la suite s'installer à Rennes, si possible. Si ça ne l'est pas, le reste de la Bretagne fera l'affaire. Mais avant de s'engager dans les recherches de logement et de travail, un peu de vacances s'imposaient. Ils restent un peu à Paris, traînent leurs sacs jusqu'au pays basque, au Mans, à Avignon... Et puis après le bon temps, les galères. "La France, c'est la bureaucratie!", rigole Ignacio, avant de reprendre, sur un ton plus sérieux: "si tu veux un travail, tu as besoin d'une adresse, si tu veux une adresse, tu as besoin d'un travail... Tu ne peux pas ouvrir de compte bancaire, ni obtenir une carte SIM... C'est une boucle, et il faut quelqu'un pour t'y faire entrer à la base, sinon tu n'y arrives pas." Eux deux ont bénéficié d'un petit coup de pouce de leurs amis français.
"Partir, c'est tout laisser de côté, jusqu'à ses meubles et sa voiture. On a échangé tout ce qu'on avait de sûr contre mille questions et une incertitude absolue"
Pour ce qui était des papiers, c'était un petit peu moins la galère. En effet, Ignacio possède une double nationalité, franco-italienne, qu'il tient de son arrière-grand-père. Pour lui donc, aucun souci pour entre dans l'Union européenne. Seule Analia a dû faire une demande de VISA, qu'elle devra renouveler à l'issue de cette première année dans l'hexagone. Elle est d'origine espagnole mais n'a jamais fait de demande de double nationalité.
Depuis maintenant sept mois, Ignacio travaille dans une biscuiterie à Briec, petite commune finistérienne à 15 minutes en voiture de Quimper. Analia, elle, est agent d'entretien.
L'Argentine, cette "terre de vins, de soleil, de montagnes et de désert"
Rien à voir avec leurs emplois respectifs en Argentine. Analia travaillait dans les tribunaux de commerce. Elle était secrétaire du juge, aidait à la résolution de litiges. Ignacio, lui, était déjà dans le changement. "Après six ans dans le dessin industriel j'ai voulu changer de métier. J'ai trouvé un gars sympa qui me payait pour me promener à cheval dans les montagnes!" En d'autres termes, il était guide touristique.
Mais de l'Argentine, cette "terre de vins, de soleil, de montagnes et de désert", comme s'amuse à le décrire Ignacio, ce n'est certainement pas ce qui leur manque le plus. Tous deux pensent beaucoup à leur famille, à leurs amis... "Partir, c'est tout laisser de côté, jusqu'à ses meubles et sa voiture. On a échangé tout ce qu'on avait de sûr contre mille questions et une incertitude absolue", poursuit Ignacio.
Mendoza, Argentine (dans ces montagnes, Ignacio et Analia faisaient du rappel et du trekking)
En revanche, l'ambiance de l'Argentine leur manque beaucoup moins. "On doit toujours faire attention là-bas, regarder à droite et à gauche, vérifier qu'on a bien fermé la porte à double tour...Quand tu t'arrêtes à un feu rouge, tu passes la première vitesse, au cas où tu dois partir rapidement", précise Ignacio. "C'est pénible d'être toujours sur ses gardes", renchérit Analia. "Quand je sortais à 5 heures du matin, j'avais peur. Ici, pas du tout. On ne pense même pas à mettre la clé dans la porte!"
En comparaison, ces deux Argentins se sentent donc vraiment apaisés dans la ville où ils vivent désormais, Quimper, commune de 63.000 habitants dans le sud du Finistère. "Les champs n'ont pas de clôture, les maisons pas de grillages, les voitures pas d'alarmes..."
Quimper, France
"Non, rien de rien, non, je ne regrette rien"
Les deux tourtereaux, qui se sont rencontrés quand Analia était à l'université, ne sont donc pas prêts de repartir. Ils pourraient retourner en Argentine avant mai, pour qu'Analia puisse retrouver le job qu'elle a laissé derrière elle, mais il n'en est pas question. Du moins, pas tout de suite. Ils ont encore envie de profiter des "gens chaleureux", comme ils décrivent tous les deux les Quimpérois.
Même s'ils ont déjà vagabondé en Bretagne, ils n'ont certainement pas encore épuisé tous les moindres recoins de la région qu'ils aiment tant. Et quand on les questionne sur le sens de ce changement, leur joie de vivre fait plaisir à entendre. "C'est mon premier voyage, la première fois que je prenais l'avion, une belle expérience", décrit Analia. "C'était un changement énorme, j'aime faire ce que j'ai envie de faire, et parfois c'est radical", précise Ignacio. Qui conclut avec humour: "non, rien de rien, non, je ne regrette rien."
Ignacio et Analia, à Plougastel-Daoulas
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