Argentine : scandale politique après une triple évasion

L'année 2015 avait commencé pour les Argentins avec la mort plus que suspecte, le 18 janvier, du procureur Alberto Nisman, qui menait l'enquête sur des attentats antisémites meurtiers à Buenos Aires en 1994. Elle s'achève avec une autre affaire qui mèle politique et criminalité : l'incroyable évasion, dimanche, de trois tueurs condamnés pour le triple assassinat, en 2008, de membres d'une supposée mafia revendant des produits pharmaceutiques. L'un des condamnés avait en juillet accordé une interview dans sa prison où il désignait comme parrain du narcotrafic rien moins qu'Aníbal Fernández, chef de cabinet de la présidente Cristina Kirchner entre 2009 et le mois dernier. L'accusation a pu peser lors des élections de novembre, à l'issue desquelles le candidat de droite anti-Kirchner Maurici Macri est devenu président. Quant à Aníbal Fernández, surnommé «le Morse» en raison de son épaisse moustache, il a perdu son duel face à la macriste María Angeles Vidal pour devenir gouverneur de la province de Buenos Aires.

Les trois condamnés à la prison à perpétuité, Victor Schillaci et les frères Cristian et Martín Lanatta, se sont fait la belle d'une prison de haute sécurité de General Alvear, à 200 km de Buenos Aires, avec une déconcertante facilité. Après s'être procurés une arme factice, ils ont menacé deux gardiens pour se faire ouvrir les portes et ont pris la fuite dans une voiture de l'administration pénitentiaire, en prenant un des matons en otage. Qu'ils ont libéré une fois dehors, avant de disparaitre. Le scandale est énorme en Argentine. La nouvelle gouverneure a dès lundi demis de ses fonctions la directrice provinciale des prisons, nommée par l'administration précédente. Le ministre de la Justice nouvellement nommé, Germán Garavano, a commenté : «Ma sensation, c’est que la fuite a à voir avec des strcutures de pouvoir mafieuses enkystées dans l’Etat, dans le cas présent le service pénitentiaire de [la province de] Buenos Aires.»

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Le triple homicide de 2008 était lié à un trafic d'éphedrine, cet alcaloïde aux vertus dopantes bien connu des cyclistes, qui est aussi utilisé pour produire des drogues de synthèse, les méthamphétamines en particulier. Les trois victimes étaient liées à un distributeur de produits pharmaceutiques qui avaient fait fortune en revendant de l'éphédrine importée aux narcos mexicains. Leur société avait ainsi pu faire un don généreux à la campagne électorale de Cristina Kirchner, candidate en 2007 à la réélection.


François-Xavier Gomez

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