Le gouvernement argentin a fait appel vendredi devant la plus haute cour d'une décision favorable à Clarin prise la veille par une cour d'appel et suspendant l'entrée en vigueur d'une loi antitrust, a annoncé la présidence sur son site internet.
Preuve de l'importance donnée par la présidente à cette affaire, son gouvernement a eu recours à la procédure directe et exceptionnelle du +pers salto+, réservée aux cas les plus sensibles.
Pour le gouvernement, l'arrêt de la cour d'appel prolongeant la suspension obtenue par Clarin "jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la constitutionnalité de la loi" sur les médias audiovisuels (2009), "est en contradiction avec la décision de la Cour suprême fixant au 7 décembre la limite de validité de la suspension".
La décision de la cour d'appel est un revers pour Mme Kirchner qui a fait de cette affaire son cheval de bataille et comptait lancer le processus de transfert et d'appel d'offres d'actifs de Clarin dès vendredi.
Elle s'en remet maintenant à une Cour suprême aussi prestigieuse qu'imprévisible.
Contrairement à la Cour suprême du temps du président Carlos Menem (1989-1999), qui lui était notoirement acquise, l'actuelle Cour est en effet considérée comme indépendante.
Cette indépendance est une des grandes réussites, de l'avis même de l'opposition, du mandat de Nestor Kirchner (2003-2007), le mari et prédécesseur de Mme Kirchner décédé en octobre 2010.
Le gouvernement risque gros, car il avait fait du 7 décembre, qu'il a baptisé le "7D", une date emblématique.
"Avec un dixième de l'énergie dépensée dans cette Loi sur les médias on aurait eu raison de l'inflation et de l'insécurité", a critiqué l'ancien chef de gouvernement de Mme Kirchner, Alberto Fernandez, désormais en froid avec elle.
La loi qui limite le nombre de réseaux de télévision par câble, de chaînes et de radios détenus par un même groupe devait s'appliquer au groupe Clarin, critique féroce du gouvernement.
Le processus de transfert de licences et d'appel d'offres devait débuter le 7 décembre pour tous les groupes qui n'auraient pas présenté un plan de mise en conformité avec la loi.
L'opposition a accusé le gouvernement d'avoir fait pression sur la justice, mettant en danger l'équilibre des pouvoirs, et de vouloir bâtir un réseau médiatique acquis à sa cause.
"Il ne s'agissait pas seulement de la Loi sur les médias, mais de défendre l'indépendance des pouvoirs", a dit le député radical Ricardo Alfonsin, fils du président du retour de la démocratie Raul Alfonsin (1983-1989).
"L'Argentine se dirige vers le contrôle des médias par l'Etat", a dénoncé la sénatrice du Front Progressiste (centre-gauche), Norma Morandini, à l'issue d'une rencontre au Congrès avec une délégation de la Société interaméricaine de presse (SIP) dépêchée en Argentine pour suivre de près l'évolution du dossier.
Clarin estime que la nouvelle loi est faite sur mesure pour dépecer le groupe.
En revanche, pour l'Autorité fédérale des services de communication audiovisuelle (AFSCA), la Loi sur les médias doit permettre une plus grande diversité.
Le groupe Clarin possède, outre le journal éponyme le plus vendu du pays, plusieurs chaînes de télévision, des radios et des réseaux de télévision par câble. Son chiffre d'affaires a été en 2011 de 9,7 milliards de pesos (1,6 milliard d'euros), en hausse de 27,8% par rapport à l'année précédente.
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